Il y a bien entendu plusieurs raisons pour intéresser les distributeurs : une des raisons concerne l'étiquette qu'avait hérité ce cinéaste au milieu des années 90 comme le rappelle une nouvelle fois David Martinez : "Malgré les efforts de d'une partie de la presse qui n'a pas lésiné sur le dithyrambe, force est de constater que les deux films du Tarantino (sic !) chinois n'ont pas trouvé leur public". L'autre raison, vient bien entendu de notre héritage, celle de la culture cinéphilique française, issue de la politiques des auteurs qui a toujours tendance à privilégier des cinéastes en marge de leurs pays et de leurs systèmes. C'est ce confirme Charles Tesson, puis Olivier Assayas lors d'un entretien centré autour du statut de Wong Kar Wai : "Aujourd'hui, le cinéma de Hong Kong se résume aux films de Wong Kar Wai, qui apparaît comme un emblème stylistique du cinéma local, voire du cinéma asiatique, dont Hou Hsiao Hsien serait l'envers (taiwanais) symétrique."
"Wong Kar Wai a une démarche autonome, indépendante. C'est un poète dont le cinéma est en prise avec une vérité de la ville de Hong Kong. Là, on rentre dans une autre histoire, dans un autre système international ou des cinéastes isolés donnent des nouvelles de leurs villes : Hou Hsiao Hsien, Nanni Moretti, Aki Kaurismaki, Atom Egoyan etc... Ces cinéastes connaissent bien la géographie contemporaine du cinéma et sont davantage légitimés par une reconnaissance internationale que locale". Le problème majeur qui a toujours touché le cinéma de Hong Kong et qui expliquerait la difficulté pour les films de Hong Kong à trouver des distributeurs vient simplement du fait que c'est cinéma de genre, orienté vers le divertissement de masse. Et que la politique des auteurs fait rarement bon ménage avec le cinéma de genre ; il est logiquement mis de coté car pas assez "culturel ". Avec Wong Kar Wai, ce problème ne se pose plus puisque c'est un cinéma qui selon les distributeurs prend
ses distances avec l'imagerie du cinéma de Hong Kong (ce qui est vrai d'une certaine manière). En d'autres termes avec Wong Kar Wai (et c'est vrai avec Stanley Kwan réalisateur de Rouge (1989), Center Stage (1991) et de Lan Yu (2001) et Fruit Chan, réalisateur de Made in Hong Kong (1999)), le cinéma de Hong Kong détient enfin leurs premiers auteurs et "cinéastes officielles " et c'est cette carte auteuriste chère en France que jouent les distributeurs.
(Pour en savoir plus, voir article Positif N°477, novembre 2000 Wong Kar Wai et les cinémas chinois)
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