Le schéma de ce type de films varie finalement assez peu : le héros se fait estropier ou humilier (s'il est déjà handicapé) dans une première partie, il s'entraîne dans une seconde et il se venge dans la dernière, chacun de ces segments s'achevant sur un climax. Si les infirmités les plus courantes sont la perte d'un bras, de l'usage de ses mains ou la cécité, on rencontre également des culs-de-jatte, des sourds et des déséquilibrés.
Lorsque l'œuvre est portée par un metteur en scène de qualité, la partie la plus intéressante demeure celle de l'entraînement au cours duquel l'épéiste se reconstruit mentalement en même temps que physiquement. Le déclic vient d'ailleurs souvent de l'extérieur : un enfant jouant avec un chat (The Sword of Swords), un sympathique compagnon (One-Armed Swordsman) ou une femme (One-Armed Swordsman, King Boxer). Chang Cheh, grand instigateur du genre, s'est fortement inspiré du personnage japonais Zatoichi (Shintaro Katsu), extrêmement populaire dans toute l'Asie, pour créer le sabreur manchot. Jimmy Wang Yu, qui restera pour tous l'image du héros handicapé, emportera d'ailleurs cette figure de la Shaw Brothers à la Golden Harvest pour des aventures beaucoup plus « cartoonesques ». (Ironiquement, le sabreur manchot rencontrera des années plus tard le masseur aveugle au cours d'un cross-over mémorable.)
Sun Chien le cul de jatte dans Crippled Avengers
Un Chang Cheh en pleine décadence exploitera à nouveau le filon à la fin des années 70 dans l'inénarrable Crippled Avengers / La Vengeance des infirmes, réjouissant nanar bien loin du One-Armed Swordsman ! On compte aussi également nombre de navets tournés aux Philippines, en Thaïlande, à Taiwan et ailleurs, certains à la limite de l'insoutenable (The Crippled Masters pour n'en citer qu'un).
La figure de l'épéiste handicapé sera bien évidemment détournée par les plus grands (Stephen Chow dans Magnificent Scoundrels) et réapparaîtra sporadiquement dans des films d'arts martiaux (The Blade de Tsui Hark en 1995).
Il est à parier que le héros infirme n'est pas encore mort !
David-Olivier Vidouze (Octobre 2005) |