Clement Cheng: Il y a toujours un tas de contraintes extérieures qui vous empêchent de faire ce que vous voulez faire. Parce qu'ils ne savent pas ce que vous faîtes. Je suis le seul à savoir, avec mon co-réalisateur. Tout ce qu'on peut faire, c'est de s'y adapter. Plus il y a de pression, et plus il y a de contraintes, plus votre créativité est stimulée. Si vous êtes complètement libre, vous n'arrivez à rien faire. C'est comme une boîte: vous êtes enfermés dedans et vous essayez d'en sortir.
Peter Chan m'a dit un jour que lorsqu'un réalisateur de HK se rend à Hollywood, les hongkongais l'admirent, et lorsqu'il va au Nord, en Chine, c'est un vendu. Mais ce n'est pas vrai : vous devez faire beaucoup de compromis quel que soit l'endroit, à Hollywood ou en Chine. Il s'agit simplement d'être suffisamment créatif, suffisamment malin pour contourner les obstacles et atteindre vos objectifs. Peter Chan a fait deux films à Hollywood et cinq en Chine. Il m'a dit que c'est finalement plus difficile, qu'il y a plus de règles à suivre à Hollywood qu'en Chine, et ceci malgré la censure qui est beaucoup plus présente en Chine. Il m'a dit avoir eu beaucoup de liberté malgré ces circonstances.
C'est vraiment le bordel pour faire des films à HK, parce que les gens de HK, c'est typique, sont tout le temps en train de gueuler. J'ai écrit un scénario et il y a un scénariste reconnu, c'est lui qui m'a crié dessus en salle de conférence pendant cinq heures. Sur chaque page, chaque phrase, il disait « c'est de la merde », ou me traitait de « fou » ou « d'immature ». Pendant cinq heures. J'ai vraiment douté de moi-même. Après ces cinq heures, le réalisateur est arrivé. Nous étions amis avant mais là ça devenait tendu. Il m'a demandé si je voulais toujours être son assistant-réalisateur. Si j'avais suivi ce que je ressentais, j'aurais dit non. Parce que je n'avais pas envie de me retrouver là à me faire gueuler dessus chaque jour. J'aurais pu être ailleurs en train de boire un verre.
Tout le monde voulait s'en aller. Personne ne savait ce qui allait se passer mais j'ai voulu rester. Ironiquement, ils ont engagé un autre scénariste, à qui il a fallu un mois pour réécrire le script. Et après cela, je suis redevenu le scénariste attitré car le producteur avait lu les deux versions et pensé que la mienne était meilleure.
Et si je n'étais pas resté, je ne serais plus scénariste ni réalisateur aujourd'hui. |