Johnnie To : Il m’a fallu deux ans, pendant lesquels je ne me suis pas du tout occupé d’autres choses. Auparavant, mes scénaristes et documentalistes avaient effectué un impressionnant travail de recherche sur les triades. Nos bureaux étaient envahis de documents sur le sujet ! On me demande souvent pourquoi j’ai fait ces deux films. Cela remonte à l’époque de la Rétrocession de Hong Kong à la Chine (1997). Je me souviens d’une déclaration vraiment très étonnante du chef de la police chinoise d’alors, qui a dit que les triades étaient aussi des organisations patriotiques ! Que voulait-il dire par là ? Il reconnaissait l’existence et le rôle des triades dans la société de Hong Kong ? Il les légitimait ? J’ai été très surpris par la nature de cette déclaration. L’idée de faire un film sur le fonctionnement des triades a alors commencé à germer dans ma tête. S’est ajouté à cela le débat qu’on avait à Hong Kong sur notre devenir politique. On se battait pour la démocratie et les élections libres. En faisant nos recherches, nous nous sommes aperçus que les triades pratiquaient une forme d’élections libres depuis près d’un siècle ! Depuis longtemps, le chef de certaines triades était désigné à la suite d’un processus électoral. C’était une matière vraiment intéressante pour le cinéma.
Mais avant de me lancer dans ce projet, je me suis dit à moi-même : « Johnnie To, tu dois savoir où tu vas. Il ne faut pas que tu oublies la vraie nature des triades. ». Les triades sont des organisations criminelles, il ne faut jamais oublier cet aspect des choses.
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