Johnnie To : Le cinéma de Hong Kong a toujours fonctionné avec des financements privés. A l’époque de la concession, le gouvernement anglais ne nous avait jamais soutenus. Il fallait se débrouiller seul quand on voulait faire du cinéma. Les producteurs devaient emprunter auprès des banques ou investir leurs propres économies. Leur souci premier était la rentabilité. Ils devaient donc produire des films susceptibles de plaire au public et de leur rapporter beaucoup d’argent. La plupart ne cherchait pas à faire de l’art. Toutefois, nous avons eu de grands producteurs comme Run Run Shaw ou Raymond Chow, qui ont su bâtir de grands studios et produire de grands films, ambitieux sur le plan artistique, et capables de drainer un large public en salles.
Fondamentalement, nous n’avons pas le même système socio-économique qu’en France par exemple. La France est un pays qui a beaucoup de respect pour sa culture, pour la culture. Regardez ces beaux immeubles anciens, ce grand musée du Louvre ! [ndlr : Nous étions en voiture, sur la rue de Rivoli, entre le Louvre, les Tuileries et la place de la Concorde…]. Il y a ici un grand respect pour le passé. Le cinéma français a aussi la chance d’être très soutenu par les pouvoirs publics, qui aident à son financement. Les cinéastes peuvent alors faire des films plus artistiques, plus personnels. Les pays comme la France et la Corée, dont le cinéma bénéficie du soutien des pouvoirs publics, ont beaucoup de chance et arrivent à produire de nombreux bons films. Depuis peu, il y a aussi un système d’aide à la production à Hong Kong, mais il n’est vraiment pas comparable au vôtre. D’ailleurs, parmi ceux qui siègent à ces commissions il y a beaucoup d’anciens producteurs qui ont personnellement échoué dans le métier et qui sont déconnectés de la réalité du secteur !
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