Dans les films occidentaux, la violence à mains nues est brutale et rapide, le but étant d'assommer l'adversaire. Les techniques d'art martiaux se fondent essentiellement sur une capacité à esquiver les coups. Dans ce contexte, le combat dure jusqu'à ce que l'un des adversaires soit poussé à la faute. Il s'étire donc dans le temps, et c'est ce qui vaut souvent aux films d'arts martiaux d'être juger ennuyeux.
Les combats offrent pourtant la possibilité de voir de véritables artistes martiaux qui font preuve d'une incroyable agilité. A ce titre ils sont un peu comme des numéros de cirque, à la fois dangereux, il y a régulièrement des blessés sur les tournages, et spectaculaire par les prouesses exécutées à l'écran. Chaque artiste martial a son style. Pour ne prendre que quelques exemples, Bruce Lee ressemble à un félin dont les gestes sont extrêmement rapides et violents. Spécialiste de Wushu, un mélange de différentes boxes chinoises, Jet Li offre l'occasion d'admirer, grâce à ses qualités athlétiques exceptionnelles, un kung fu particulièrement gracieux. Corpulent, Sammo Hung propose des gestes tout en puissance, mais il ne manque pas de souplesse pour autant. Quant à Jackie Chan, c'est un véritable homme élastique ; et si son kung-fu prend souvent ses distances avec la tradition, c'est pour mieux amuser les foules.
Kung Fu contre pistolet dans Once Upon A Time In China
Les combats peuvent être de plusieurs ordres. Le simple face à face entre deux adversaires, des jeux avec le décor ou des objets. Certains artistes martiaux aiment à utiliser les objets les plus quotidiens en arme de combat. Ainsi, une simple chaise devient entre les mains d'un Sammo Hung l'occasion de véritables prouesses physiques. Plus gracieux, Jet Li se sert d'un parapluie pour mettre à mal ses adversaires dans la série Once Upon A Time In China. Pour rendre plus spectaculaire encore les affrontements, ceux-ci se transforment parfois en véritables cascades. Jackie Chan est passé maître en la matière. Et bien souvent ses prouesses ressemblent davantage à ce que faisaient les burlesques américains que les maîtres Shaolin.
La durée des combats a également permis aux réalisateurs de réfléchir aux différentes manières de les mettre en scène. Art du mouvement, le combat martial s'est traduit sur le plan cinématographique par un travail sur la vitesse et la précision. Toute la difficulté consiste à cadrer au plus juste les gestes rapides des acteurs. Certains réalisateurs, comme Lau Kar-lau, dans Les Arts martiaux de Shaolin par exemple, préfèrent limiter leur découpage pour montrer les gestes dans leur intégralité. D'autres, au contraire, ont recours à des montages plus découpé pour renforcer l'impression de vitesse. Les bruitages ont également un rôle capital. Les coups sont renforcés par des effets sonores afin de les rendre encore plus impressionnants. Ce travail sur les sons est particulièrement sensible dans des films comme Druken Master où le niveau sonore des coups est véritablement décuplé.
Lam Ching Ying dans The Prodigal Son
La nécessité d'organiser les combats dans le champ de la caméra et de le monter de manière dynamique a donné naissance à une catégorie spécifique de professionnels du cinéma : les chorégraphes. Souvent spécialistes des arts martiaux, ils se sont formés aux techniques du cinéma pour aider le metteur en scène à régler les scènes de combat. Représentants d'une école ou d'un style, ils ont apporté leur marque aux films d'arts martiaux. Les plus célèbres sont Lau Kar-leung, Corey Yuen, Yuen Woo-ping, Tony Ching Siu-tung. Tantôt ils ont mis leur talent au service d'un réalisateur, tantôt ils ont dirigé leur propre film. Ils ont en tout cas contribué à faire de ce moment de violence qu'est le combat, un moment de grâce que l'on peut comparer au morceau chanté d'une comédie musicale.
D'ailleurs certains réalisateurs n'ont pas manqué de faire le rapprochement. Dans une scène magnifique de Prodigal Son, le jeune héros provoque un maître en arts martiaux qui joue dans une troupe d'opéra chinois. Tout en chantant à la manière d'un opéra, référence à l'origine de la représentation des arts martiaux, le maître donnera une bonne leçon au jeune impudent qui lui chante, de manière moderne, son courroux. Belle métaphore pour célébrer le travail des artistes martiaux.
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