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La Dernière Chevalerie (1977) |
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Après avoir réalisé deux comédies (Money Crazy et Follow The Star) pour le compte de la Golden Harvest, John Woo est un réalisateur rentable aux yeux de Raymond Chow. Pourtant, cette situation ne le rend pas particulièrement heureux, car le jeune homme souhaite tourner un film de gangsters depuis ses débuts au cinéma, ce que le studio lui a refusé à plusieurs reprises. Hormis Princess Chang Ping, les films précédents de John Woo étaient plutôt médiocres, mais Last Hurrah For Chivalry va constituer une seconde réussite, dans un genre qui correspond d’avantage à ses attentes. Le film est clairement un hommage à Chang Cheh et aux autres cinéastes qui ont inspiré John Woo, une sorte d’ovni passéiste en comparaison des derniers films des auteurs de la nouvelle vague.
Dans le reportage intitulé L’adieu aux sabres, réalisé par David Martinez, John Woo revient sur Last Hurrah For Chivalry, et explique en détails son projet. A l’époque de la réalisation du film, la mode était à la rapidité, aux mouvements de caméra saccadés, et le wu xia pian n’était plus vraiment un genre en vogue. Pourtant, Woo décide de rendre un hommage à Chang Cheh, pour qui il fut assistant à la Shaw Brothers, au risque de paraître en retard sur son temps. Aussi, et sur les recommandations du maître du wu xia pian, il confie le rôle principal de son film à Wai Pak. John Woo souhaite que Last Hurrah For Chivalry se rapproche des anciens films japonais de samouraïs, avec de longues séquences et peu de mouvements de caméra. Il désire aussi donner l’impression aux spectateurs d’assister à une pièce de théâtre. Enfin, il cherche à se rapprocher des westerns de Sergio Leone qui l’ont influencé dans sa jeunesse, notamment lors des duels à l’épée. Toutes ces influences font de Last Hurrah For Chivalry le premier film « personnel » de John Woo, et une excellente introduction à la découverte des œuvres de ce grand cinéaste.
Du point de vue de la réalisation, John Woo remplit son cahier des charges. Les combats sont filmés en longues séquences, et les plans sont larges. La caméra bouge peu, et se contente de suivre doucement les épéistes. Comme le souhaitait John Woo, Last Hurrah For Chivalry rappelle parfois les westerns de Sergio Leone sortis dix ans plus tôt. Le réalisateur se focalise sur les regards des combattants, leurs armes, et créée une certaine tension avant le début des hostilités. Les angles choisis sont assez conventionnels, on est loin ici de ce que proposera Tsui Hark par la suite. Toutefois, John Woo use aussi de vues subjectives, notamment lors du dernier combat. Il suspend pour cela son caméraman à un câble, et le fait se diriger vers les combattants, ou encore fait trembler l’image, en l’accompagnant d’une respiration haletante, obtenant un sentiment de danger permanent, à la manière d’un Alfred Hitchcock. De plus, John Woo nous gratifie déjà de quelques éléments que l’on retrouvera tout au long de sa filmographie. On assiste ainsi à un combat dans une salle remplie de bougies, à la manière de The Killer, réalisé une dizaine d’années plus tard, et un grand nombre de ralentis, toujours habilement utilisés. Woo ne cherche pas à styliser son film à tout prix, et se focalise d’avantage sur les sentiments de ses personnages. C’est la mise en scène qui sert l’histoire, et non l’inverse. Cette histoire, justement, est fondée sur des thèmes chers au réalisateur. L’honneur, l’amitié, la trahison et le sens du sacrifice sont déjà présents, et préfigurent les œuvres à venir du metteur en scène. Néanmoins, John Woo s’est vu contraint par le studio d’apporter une touche comique à Last Hurrah For Chivalry. On a ainsi droit à une scène de combat entre les deux héros et un combattant narcoleptique. Cependant, cette séquence ajoutée à la demande des producteurs ne nuit absolument pas au film, et s’avère même en être une des meilleures scènes. Du côté des acteurs, il n’y a rien à reprocher à Damian Lau et Wai Pak. Leurs interprétations sont convaincantes, tant au point de vue des combats que des sentiments dégagés. Les autres comédiens, sans être remarquables, n’abaissent pas le niveau global du film.
Malgré toutes ses qualités, Last Hurrah For Chivalry ne rapportera pas d’argent à la Golden Harvest et n’obtiendra pas la clémence de la critique, qui jugera le film trop hybride. John Woo est donc de nouveau assigné à tourner des comédies, et devra encore attendre quelques années et sa rencontre avec Tsui Hark pour véritablement réaliser les films dont il rêve.
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Sébastien Massaferro 12/4/2005 - haut |
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