Le tournage terminé, Jennifer Lynch n'a pas eut droit de monter le film qui est sorti en 2010 sous le titre anglais de Hisss. Au vu de la critique médiocre qu'il a reçue et sa disponibilité en format dvd, les organisateurs de Fantasia n'ont pas jugé pertinent de présenter le film au festival. A noter qu'au lieu de chercher à présenter Hiss, les programmateurs du Festival ont préféré plutôt montrer Chained nouveau film de Lynch une histoire de serial killer faisant « l'éducation » d'un petit garçon kidnappé. N'ayant pas vu ce film, je ne puis le commenter mais il semble avoir reçu un fort bon accueil.
Par souci de complétion, j'ai fini par voir Hisss plusieurs mois après la fin du festival. Le film raconte comment une déesse Cobra prend la forme d'une belle jeune femme pour chercher son amant Serpent kidnappé par des humains avides de l'immortalité que la divinité peut conférer. Fort populaire, la légende de la femme serpent a été sujette à de nombreuses adaptations filmiques parfois sur l'angle mythique d'autres d'horreur. La version de Lynch cherche à combiner les deux approches avec une l'histoire qui déroule dans l'Inde contemporaine et à part les kidnappeurs, Naga s'en prend également à des voyous violeurs et batteurs de femmes qu'elle croise sur sont chemin.
Plus qu'un simple film d'horreur, Lynch (qui a écrit elle-même le scénario) a cherché à faire du film une fable féministe imbue de l'esthétique propre au film Bollywood. Bien que dans un registre différent, Hiss peut se rapprocher de Slumdog Millionnaire autre tentative plus reconnue de mixage mi-hollywood/mi-bollywood. Au cœur de la démarche de Lynch, on trouve la sensualité frémissante de la femme serpent. Considérant qu'encore récemment la présentation directe de baiser était taboue dans les films indiens, la démarche de Lynch était toute une audace.
Aussi louable qu'ait été ses intentions et malgré toute la sympathie que l'on peut éprouver pour Lynch au vu des difficultés quelle aura rencontrées lors du tournage, Hisss n'en demeure pas moins un nanar des plus mal foutu. Certes, le film a quelques louables qualités visuelles (la direction, la photo, la sensualité de la vedette Mallika Sherawat et les remarquables métamorphoses physiques de la femme serpent (conçues par le spécialiste américain Richard Kutzman). Toutefois, au delà d'une trame aussi confuse que dissipée et un montage bâclé (dont la responsabilité ne peut être imputable à Lynch), Hisss souffre également d'un jeu d'acteurs inégal (celui de l'odieux kidnappeur américain notamment, caricaturale à souhait), d'effets CGI calamiteux et de nombreux éléments visuels, narratifs et thématiques qui versent dans une outrance kitsch assez risible (notamment l'accouplement de Naga avec un serpent de caoutchouc et même un lampadaire). En cherchant à capturer l'ambiance de l'Inde, de ses mythes et de ses festivals religieux colorés, le film fait également quelque peu dans le lyrisme de pacotille. Bref, s'il avait été montré au Festival, Hisss se serait certainement qualifié comme un des navets du festival. Dommage.
Cote : ** |