Laurent Courtiaud : Non. Ça pourrait, mais à Hong Kong on a bossé sur beaucoup de plateaux quand même. C'est comme ça qu'on a travaillé sur In The Mood For Love quand on écrivait pour Wong Kar Wai. On écrivait le scénario à côté de lui, on était tout le temps sur le plateau, on l'aidait. Et notre chef-opérateur Ng Man Ching était chef électro sur Black Mask 2 ; on a souffert sur le même plateau. Et puis la productrice du film, notre partenaire Kit Wong, qui est aussi réalisatrice, on a déjà écrit pour elle ; elle n'a engagé que des gens qu'on connaissait.
L'équipe de production, c'est des gens qui viennent pour beaucoup de Ip Man. Nous on connaît assez bien Wilson Yip, donc c'est des gens qui nous connaissent, ils savent que ça fait quinze ans qu'on est là, sur les plateaux. Quand on est arrivé en préparant notre travail et en leur disant exactement ce qu'on voulait faire, ils ont vu très vite qu'on ne se trompait pas, qu'on savait prendre des décisions rapidement.
Carbon se dépêche de prendre son temps sur le plateau.
Screenshot tiré du making of.
© The French Connection.
Julien Carbon : Et puis ils savent qu'on vient de l'école de la Workshop, donc il n'y a pas de problème. Non, moi j'ai été bizuté parce que j'ai fait une erreur. En fait, il est de tradition quand un acteur a tourné son dernier plan qu'on le fasse applaudir. Et donc quand on a fini de tourner les scènes avec Maria, j'ai dit « Voilà, c'est le dernier plan de Maria Chen », et là le premier assistant me dit « Mais tu es fou !». De fait il restait encore toutes les scènes où on voit son cadavre sur le sol et ça m'était sorti de l'idée.
C'était très gentil. L'équipe était vraiment comme une famille. Il est de traditions pendant les tournages à Hong Kong, dans les jours où on est en studio, où on sait qu'on ne va pas se déplacer, de faire un barbecue où tout le monde amène ce qu'il veut. Donc tout le monde amène des saucisses, de la bouffe. Et pendant le tournage dès qu'on a le temps on va chercher un peu la bouffe, donc il y avait vraiment une grande cohésion dans l'équipe. C'est des gens extraordinaires. On a eu une chance immense. Je pense aussi que si ça a été facile, c'est parce qu'on a envisagé [le tournage] comme un vrai travail d'équipe. Quand tu as un chef-op comme Ng Man Ching, tu ne vas pas lui dire « Ah ben attends, c'est n'importe quoi ». Tu ne vas pas lui gueuler dessus : parce que ses décisions sont toujours les bonnes. Et en plus on était exactement sur la même longueur d'onde. Donc il n'y avait pas de problème. Et puis on avait des assistants qui étaient très gentils.
Ng Man Ching, directeur de la photographie. Screenshot tiré du making of.
© The French Connection
Laurent Courtiaud : Il y a eu un très bon équilibre entre Ng Man Ching et Horace Ma, notre directeur artistique, qui a fait Rouge et la plupart des films de Daniel Lee. Donc il est bon aussi. C'était un bon équilibre et on savait très bien ce qu'on voulait, que ce soit pour la lumière, pour le cadre… Mais ils avaient suffisamment de liberté pour s'exprimer. Et ça a parfaitement fonctionné ; ils n'ont jamais eu l'impression qu'on leur apprenait leur métier, on respectait parfaitement leurs connaissances et leur filmographie. Ils ont une expérience que nous n'avons pas, ils le savent et ils savent que nous le savons. Ce n'est pas pour autant qu'ils allaient faire tout ce qu'ils voulaient, n'importe comment. C'était dans une direction bien précise mais à chaque fois on les laissait trouver le petit plus qui rendait les choses encore mieux. Ils avaient bien l'impression de pouvoir s'amuser à trouver des idées supplémentaires, et à voir quand même qu'on savait ce qu'on faisait et qu'on n'était pas là à leur dire « Fais nous un truc bien. Allez, vas-y cadre ».
Julien Carbon : C'est vrai qu'on avait une idée très précise des cadres qu'on voulait et on a donc eu une relation très étroite. Mais il n'y a eu aucun problème. Et puis nos deux assistants étaient géniaux. Enfin il faudrait citer toute l'équipe parce qu'ils étaient vraiment tous formidables. Tous ont des personnalités super intéressantes. Notre assistante Yiu Man-Kei a commencé à la Shaw Brothers, elle a été assistante sur Police Story. Elle a donc une très grande expérience, et puis c'est une femme adorable qui sait être maternelle quand il le faut avec nous et nous pousser quand il faut nous pousser, et régler les problèmes quand il faut les régler. Même si elle est très têtue, et que de temps en temps elle a du mal à entendre « Non ».
Quand on s'est quittés, tout le monde pleurait. Je crois qu'on a tous été super heureux de l'expérience. On était contents de ça, que tout le monde se soit trouvé. En plus Horace et Man Ching n'avaient jamais travaillé ensemble, donc c'était vraiment une superbe rencontre entre eux deux. Et tout le monde tirait dans le même sens. C'était super !
Une idée précise du cadre. Screenshot tiré du making of.
© The French Connection.
Laurent Courtiaud : Le prochain on le refait avec la même équipe, et ils sont déjà prêts. On aura les mêmes assistants, le même chef-opérateur, les mêmes gens pour le son en Belgique, qui ont fait un super boulot de mixage. On va par contre avoir un directeur d'action différent, parce que là il va y en avoir beaucoup plus, et une action moderne. On verra qui on peut avoir, mais on a quelques pistes assez intéressantes. |