Julien Sévéon : Déjà, à une plus grande visibilité internationale, par exemple dans les festivals. Ce qu’il faut dire, c’est que ça, c’est grâce à tous les programmateurs des festivals, ceux qui font leurs choix de films. Ils se sont rendu compte petit à petit que ça bougeait extrêmement en Asie. Les distributeurs s’en sont rendu compte et les critiques, les journalistes en se déplaçant de festival en festival ont vu qu’il y avait des films vraiment exceptionnels. Petit à petit, je pense que beaucoup de journalistes ont commencé à en parler et le public a commencé à s’y intéresser. Le problème c’est qu’on reste encore dans une vision très schématique du cinéma asiatique. D’un côté une vision très art et essai « Printemps, été, automne, hiver… » qui a réussi à faire près de 300 000 entrées, je crois. Ce qui est très bien. Mais par contre après, il y a d’autres petits films comme ça qui ne réussiront pas à atteindre un tel succès.
Je pense qu’il y a [certains] distributeurs qui ont vraiment coulé tout ce travail. Il y a deux types de distributeurs : il y a ceux qui sont passionnés et les autres. Tous le font pour des histoires financières, obligé, il y a des histoires d’argent là dedans. Maintenant il y a des véritables passionnés qui ont envie de faire découvrir ce cinéma ; après il y a des opportunistes qui sont là juste pour faire de l’argent. Le problème c’est que certains distributeurs ont acheté des films qui sont complètement nazes et qui discréditent tout le cinéma asiatique. Imaginons que quelqu’un qui ne connait pas ce qui se fait en Asie, il n'arrête pas d’entendre parler à droite et à gauche, à la télé, ses potes lui en parlent, il va à Carrefour et il voit certaines collections. Et on trouvait, je ne donnerais pas de noms, on trouvait des daubes sans noms. Il y avait des films qui étaient complètement catastrophiques. Alors heureusement ils n’étaient pas vendus très cher, c’était une bonne chose mais je pense que ça n’aide pas du tout les cinémas d’Asie à se faire connaître et reconnaître en France. Je pense qu’il faut vraiment cibler uniquement les films de qualité, pas des films qu’on peut acheter en package ou qu’on peut sortir pas trop cher.
Il faut viser les films de qualité et il y en a énormément en Asie. Le problème c’est que certains distributeurs n’osent pas prendre de risques, d’autres misent uniquement sur certains noms, on reste sur tel ou tel réalisateur ; mais c’est pas parce qu’on s’appelle bidule ou chouette qu’on ne réalise que des bons films, et bidule et chouette ils réalisent aussi des daubes. Donc quand on sort des daubes de tel ou tel réalisateur ce n’est pas bon non plus pour ça.
Maintenant c’est bien, il y a aussi des petits distributeurs qui essaient de sortir des trucs plus étonnants. Mad Asia essaie de faire des trucs différents. Kubik aussi essaie de sortir du tout avenant.
Par contre on se rend compte pour le cinéma asiatique que là, on est en train de rentrer dans une crise. Il y a de moins en moins de films qui sont distribués au cinéma, il y en a de moins en moins qui sortent en DVD. Alors pour ça il y a deux raisons. C’est vrai que les cinéphiles et les passionnés ne soutiennent pas ces films et ne vont pas les voir au cinéma. Ou alors quand le film sort au cinéma, ils disent « Moi je l’ai en DVD, je ne vais pas le voir au cinéma », et ça c’est un truc qui est dramatique parce que le cinéma c’est fait pour être vu sur grand écran et même si chez soi on a du home cinéma et tout ça, le cinéma lui-même, la notion même de cinéma ne peut être vécue que dans une salle de cinéma. Quand un réalisateur tourne, c’est en pensant à la salle de cinéma. Pour moi, si on veut vraiment pouvoir bien ressentir un film, le seul moyen c’est le grand écran. Le problème c’est que la vidéo, en particulier pour les cinémas d’Asie, c’est le seul moyen de pouvoir les voir.
Ensuite, il y a des prix qui sont beaucoup trop chers. Quand on sort des films asiatiques à 30 euros en DVD alors qu’on sait qu’on peut les avoir en import à 8 euros, le choix il est vite fait. Bien sûr, après, si on ne parle pas l’anglais on va se diriger vers l’édition française mais je pense qu’il y a un mauvais soutien de la part des cinéphiles et de la part des amateurs, des mauvais choix de la part des distributeurs, des mauvais choix marketing, des mauvais choix au niveau des prix. Mais d’un autre côté il y a aussi des très bons choix aussi de leur part, je ne suis pas du tout en train de pleurer.
Voilà, ce n’est pas la faute des distributeurs uniquement. Que ce soit Pretty Pictures, Wildside ou d’autres, ils ont fait du très bon travail aussi. Pretty Pictures quand ils ont sorti Godzilla Final Wars, c’était super couillu de leur part de faire ça. Le problème, le film a été un échec au cinéma parce que les gens ne se sont pas déplacés, et ça c’est dommage. C’est un plaisir de se dire qu’on a un Godzilla qui sort au cinéma enfin en France ; et personne ne va le voir ! C’est vraiment dommage. |