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L'aventure de la Shaw and Sons : 1950-1960 |
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introduction |
Au cours des années 20 et 30, les frères Shaw ont été à l’origine de la naissance de plusieurs studios de production, mais également de la constitution d’un vaste circuit de salles de cinéma couvrant toute l’Asie du Sud-Est, de Hong-Kong à la Malaisie. Ce formidable empire, qui leur a apporté richesse et prestige, a été durement ébranlé au cours de la Deuxième Guerre Mondiale qui a vu une grande partie de leurs actifs, tant de production que de distribution, détruits. Cet empire, il faudra s’attacher à le reconstruire au plus vite une fois le conflit achevé.
Après avoir passé plusieurs années à rebâtir leurs réseaux de salles de cinéma et à diversifier leurs activités financières, le début des années cinquante marquent le nouveau départ des frères Shaw dans la production à grande échelle. À la tête du studio Shaw de Hong-Kong, la Nanyang, depuis 1937, le deuxième frère Shaw, Runde, le rebaptise Shaw and Sons en 1950.

Runde Shaw
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1 : Hong-Kong ville ouverte |
Le tournant des années 50 voit la Chine se remettre de l’âpre lutte entre les forces nationalistes du Guomindang et l'Armée Populaire du Parti Communiste, conflit qui s’achève en 1949 par la victoire de ces derniers, l’instauration d’une dictature socialiste et la fuite des nationalistes et de leurs sympathisants. Ces bouleversements entraînent l’exode massif de centaines de milliers de réfugiés vers Hong Kong qui voit sa population tripler en quelques années et l’amène à devenir un vaste camp de réfugiés urbains. La colonie n’ayant pas initialement les infrastructures pour subvenir à pareil flux de population, la plupart des nouveaux arrivants sont condamnés à vivre dans des conditions extrêmement difficiles, ce qui vient s’ajouter au traumatisme profond de l’exil.

Parmi les réfugiés, on compte de nombreux producteurs, metteurs en scènes, techniciens et artistes de l’industrie filmique shanghaienne désireux d’abord d’échapper aux troubles de la guerre civile puis, après 1949, de fuir la dictature communiste. Ils arrivent non seulement avec une grande expertise cinématographique, mais également avec le désir de reconstruire à Hong Kong une industrie prestigieuse et sophistiquée, pareille à celle de Shanghai. Leur ambition se trouve renforcée par la victoire finale des forces communistes. En effet, à cause de l’isolationnisme politique et culturel instauré par le nouveau régime de la République populaire, les perspectives de distribution de longs métrages en terre chinoise sont réduites à néant et la Chine, ancienne grosse productrice, n’assure plus la fourniture de films en mandarin pour l’Asie du Sud-Est. C’est donc maintenant aux producteurs de cinéma de Hong Kong de combler ce vide. Mieux encore, il leur incombe désormais de faire naître un cinéma proprement chinois mais, redoutable défi, hors de la mère-patrie et pour un public d’exilés.
Tel est le contexte local au moment où Runde Shaw lance la Shaw and Sons Limited.
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2 : Le grand retour du mandarin chez les Shaw |
Conscient des nouvelles réalités sociopolitiques et commerciales, Runde Shaw décide d’abandonner le dialecte cantonais que les studios Shaw précédents avait employé depuis l’avènement du parlant et opte pour le mandarin, langue universelle de la diaspora. Hong Kong étant désormais en mesure de devenir la nouvelle Mecque du cinéma chinois, Runde a manifestement l’ambition de participer à cette mouvance et probablement même de vouloir la conduire. Désireux toutefois de ne se priver d'aucun public, il a alors une idée qui fera date : les films de la Shaw and Sons seront sous-titrés à la fois en chinois - compréhensible par tous, qu'importe le dialecte - et en anglais, langue internationale, s'il en est !
Il faut plus de deux ans de préparation à Runde avant que la Shaw and Sons soit fin prête à se lancer dans la production de films, période au cours de laquelle il réorganise l’administration, rénove ou construit des studios, engage du personnel et recrute des vedettes. Il s’agit pour la plupart de vétérans du cinéma de Shanghai tels Li Lihua, Bai Guang, Huang He, Wang Hao et Zhou Manhua, mais également de jeunes talents prometteur tels Lucilla Yu Ming, Zhao Lei et Zhang Yang. Un des objectifs affichés de Runde Shaw est alors de créer un véritable " star system ", dans la tradition de ce que l'on pouvait trouver à Hollywood. Pour ce faire, il va lancer un magazine, " The Screen Voice Pictorial (HK edition) ", entièrement dévolu à l'actualité cinématographique de la compagnie et qui commercialise des photos de ses stars.
Runde est finalement prêt en 1952 et six films sont produits cette année-là, un rythme et une efficacité de production comparables à la période Nanyang de l’avant guerre. Les Shaw sont vraiment de retour.


Cinq vedettes des débuts de la Shaw and Sons :
en haut les vétérans du cinéma de Shanghai : Li LiHua et Bai Guang
en bas, les nouveaux venus : Zhao Lei, Zang Yang et Lucilla Yu Ming.
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3 : La Shaw and Sons et ses rivaux |
Toutefois, la Shaw and Sons Ltd. doit faire face à des compagnies concurrentes bien implantées parmi lesquelles on compte les géants Great Wall (Changcheng) Pictures Corporation, Yung Hwa Films Company et Feng Huang (Fenghuang) Motion Pictures Co. La compétition s’avère donc relativement rude, d’autant plus que la transition du dialecte cantonais au mandarin ne se fait pas sans obstacles pour la Shaw. L'autre écueil que rencontre le nouveau studio est que malgré tous les investissements en campagnes publicitaires et promotions de vedettes réalisés par Runde, il a négligé un aspect capital de cette industrie : la qualité des productions cinématographiques. Quatre décennies passées dans ce milieu n’ont pas changé le personnage qui demeure avant tout un homme d’affaires, loin des préoccupations artistiques. Pour Runde, se sont les salles de cinéma qui génèrent de l’argent, non les films eux-mêmes. En conséquence, l’investissement est principalement dirigé vers l’acquisition, la rénovation et l’embellissement de ces salles, voire même de simples placements immobiliers. Les coûts de productions, eux, sont tirés au plus bas, ce qui affecte directement la qualité des productions de la firme. Il en résulte des films qui, sans être bâclés, manquent peut-être d'un certain lustre. Bref, pour Runde, c’est le circuit de distribution qui est au cœur de la fortune Shaw, et non le studio. Au cours des années suivantes, l’homme subira quelques pressions des membres de sa famille pour altérer sa politique de production, sans que cela ne résolve le problème fondamental affectant la Shaw and Sons .

Couverture du magazine Screen Voice Picturial montrant Li Lilua
Les productions Shaw, celles réalisées à Hong Kong mais également des studios filiales de Singapour et de Malaisie, ne constituent qu’une petite partie des films distribués par le circuit Shaw, qui diffuse également des productions japonaises et américaines. A ce titre, depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, les Shaw ont un contrat avec la moitié des majors hollywoodiennes pour l’exclusivité de leurs films. Pendant quarante ans les productions de la Warner Brothers, de la Universal, de la United Artists et une bonne partie de ceux de la Columbia seront ainsi présentées uniquement dans des salles de cinéma Shaw.
Les salles du circuit Shaw sont classées en trois catégories distinctes et ce depuis au moins les années 30. Les salles de première catégorie diffusent les plus gros films de même que les productions les plus récentes, alors que les salles de deuxième ou de troisième ordre, moins prestigieuses, présentent les films plus modestes ou en deuxième exclusivité. |
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