Après Le protecteur, Lo Wei décide de reprendre son poulain en main. Jusqu'à présent, il n'a enregistré aucun succès commercial et les critiques sont assassines. Insatisfait de certains films il a même préféré ne pas les diffuser dont (Le protecteur, une pochade insignifiante à ses yeux).
Il redirige l'acteur dans L'irrésistible (Spiritual kung fu). Cette fois ci Lo Wei cherche à surfer sur deux tendances filmiques simultanément ; à la fois le Shaolin Kung-Fu et la ghost kung fu comedy, (le Wang Yu défie le maître du karaté de Liu Chia Liang une fois de plus). L'irrésistible est un joli n'importe quoi, un petit ovni très divertissant. Un manuel de combat (« les 7 commandements ») a été dérobé à l'intérieur du monastère de shaolin. Le voleur remet le manuscrit à son fils (James Tien) pour qu'il devienne le maître absolu de la région. Seul un disciple de Shaolin (Jackie Chan) qui a appris l'art « des cinq forces » par les cinq esprits eux-mêmes, peut l'arrêter.
L'irrésistible marque une nette évolution dans la réalisation de Lo Wei (à tel point d'ailleurs qu'on se demande si il est bien le metteur en scène du film). Moins rugueux et plus agréable à regarder que ses quatre premiers films du studio, L'irrésistible compense son manque de rigueur scénaristique par un joyeux délire. Qui a volé le manuscrit ? Cette question n'a pas vraiment d'importance ou disons qu'elle est sous-traitée durant tout le film. L'intérêt va aux combats et aux scènes comiques. L'équilibre entre kung fu et comédie est mieux réparti que dans Le protecteur et le film devient un énorme foutoir dès lors que les esprits des « cinq forces », des fantômes que l'on croirait habillés pour un bal costumé, se manifestent. Taquinant dans un premier temps Jackie Chan, elles lui enseigneront ensuite leur art dans le but qu'il fasse le bien. L'acteur s'accommode très bien à ce délire et tout comme dans Le protecteur (Half A Loaf Of Kung Fu), se montre dans son élément. L'irrésistible marque une petite victoire de Jackie Chan sur Lo Wei. Si le film contient des scènes archaïques imputables au réalisateur, l'acteur a réussi à faire de l'ensemble un métrage le plus léger et frais possible. Sûrement peu enclin à continuer sur la voie de la comédie, le réalisateur reprendra totalement le contrôle sur le film suivant.
Lo Wei n'est pas un grand réalisateur, tout le monde s'accorde là-dessus. Certains lui trouveront des petites qualités, d'autres diront que c'est un tâcheron fini. Lors de sa période à la Golden Harvest, l'homme avait réussi à combler son manque de créativité par ses acteurs vedettes : Bruce Lee et Jimmy Wang Yu (quoiqu'en disent certains). Les deux hommes étaient parfaits pour s'accommoder avec le réalisateur car ils y interprétaient des rôles de série B, des cogneurs mâchoires serrées, toujours prêts à sortir les poings. Lo Wei a compris trop tard que ce genre de personnages n'était pas fait pour Jackie Chan. Pourtant, il est évident que lui aussi avait constaté l'agilité avec laquelle l'acteur s'illustrait dans le registre comique. C'est pourquoi il est impensable qu'à l'époque le producteur avait mis sur pied Le poing de la vengeance (Dragon Fist), un kung fu où l'acteur devait incarner un vengeur, un bagarreur monolithique. Cette décision confirme qu'à l'époque Lo Wei était complètement dépassé, aussi bien dans ses films que dans ses choix. Comme toutes les autres productions, l'œuvre connut un cuisant échec. Mais contre toute attente, Jackie Chan s'y montre très convaincant.
Vainqueur d'une compétition martiale, un grand maître se fait tuer par un rival amoureux. Son disciple, ainsi que sa femme et sa fille, se rendront chez le meurtrier pour le venger. Arrivé sur place, ils constateront que la région est soumise à des tyrans qui sont combattus par l'homme qu'ils cherchent à tuer.
Jackie Chan traverse tout le film en ne décrochant pratiquement aucun sourire. Jouant tout de l'intérieur, il convainc et croit à cette histoire de vengeance. Sans trop ce fouler, le film se suit agréablement. Enchaînant les péripéties et traîtrises, Le poing de la vengeance est un bon kung fu dans la moyenne du genre. Encore une fois très bon casting (James Tien, Ko Keung, Chui Fat, Yen Shi Kwan, Eagle Han, Nora Miao…), musique sympathique, tout concorde à faire du poing de la vengeance un divertissement carré et efficace.
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