La découverte du cinéma asiatique à la fin des années 90, par un public occidental plus large, a souvent été réduit à un effet de mode condamné à retomber aussi vite qu'il est apparu. La vitalité et la richesse du cinéma d'extrême orient ont déjoué ce pronostique. La huitième édition du Far East Festival donne une nouvelle preuve de la bonne santé du cinéma asiatique. En revanche, le festival a dû et a été en mesure d'adapter sa programmation aux différentes tendances et perturbations qui touchent le cinéma asiatique ces dernières années. De ce fait, si à ses débuts, le festival consacrait l'essentiel de sa programmation au cinéma de Hong Kong, il s'est aujourd'hui largement recentré sur le cinéma japonais et coréen, les plus dynamiques en terme de production actuellement. Il s'est également ouvert aux cinématographies de nombreux pays, tel que le cinéma philippin en petite forme (seulement 25 films produits en 2005) ou celui de Thaïlande qui reste une valeur montante.

Sur le plan de sa programmation, le festival a toujours refusé de se spécialiser dans un genre ou un type de cinéma asiatique. L'essentiel de la sélection comprend des oeuvres sorties en 2005. Autant dire qu'il y a à boire et à manger parmi les 72 films retenus. Ce joyeux fourre tout permet ainsi de découvrir aussi bien des films de genre que des comédies, catégorie très populaire en Asie et que l'on ne verra jamais chez nous en raison du manque d'intérêt pour ce style de produits, il est vrai très typé. Evidemment cette politique du "tout venant" conduit à voir beaucoup de films médiocres, mais elle a le mérite de mettre en contact les festivaliers avec la réalité de la production asiatique.

Le festival propose aussi une rétrospective. Cette année la musique était à l'honneur. On pourra bien sûr reprocher au festival qu'il est absurde d'aborder un thème si vaste en seulement 17 films. Si aucune perspective n'est possible dans ces conditions, cette sélection a permis d'apprécier sur grand écran quelques raretés comme The Wild, Wild Rose (1960) de Wong Tin Lam ou Hong Kong Nocturne (1967) de Inoue Umetsugu d'ailleurs présent lors du festival!

Au-delà des films proposés, après tout il est possible de les acheter en DVD Import, c'est l'état d'esprit qui règne au FEF qui fait le charme de cette manifestation. Ce festival aurait pu être tenté par une meilleure couverture médiatique en utilisant son budget pour inviter les star asiatique du moment. Il aurait pu sombrer dans une démarche résolument commerciale, comme c'est le cas pour certains festivals en France. Non! Les italiens continuent de prôner une philosophie avant tout pédagogique. C'est pourquoi le festival d'Udine reste encore très ouvert. Ainsi près de 1000 personnes ont été accrédités. Des journalistes, des programmateurs ou des acheteurs en constituent la majorité. Mais le festival accrédite également près de 200 étudiants et professeurs. Les organisateurs considèrent que ces étudiants seront les spectateurs de demain. En leur faisant découvrir le cinéma asiatique, ils jouent la carte de l'avenir en espérant que ces derniers communiqueront leurs enthousiasmes aux autres spectateurs. Le festival a d'ailleurs suscité des vocations. De nombreux sites Internet se sont crées dans le sillage de ses éditions.

La volonté pédagogique du festival se traduit également par la publication, chaque année, d'un magnifique catalogue. En plus de la présentation des films diffusés, des spécialistes font le panorama des cinémas locaux. Même si on peut reprocher à la rédaction de ne s'appuyer pratiquement que sur des intervenants anglo-saxons et que ceux-ci offrent une vision surtout économique du cinéma, cette publication est la seule qui fasse un bilan annuelle aussi complet et aussi large sur le cinéma asiatique.

En plus des personnes accrédités, des spécialistes et des invités, un public nombreux et bigarré, composé à la fois de locaux de tous horizons et de représentants des communautés asiatiques, fréquente le festival. Un vrai succès populaire. Même à minuit passé, il n'était pas évident de trouver une place pour voir Exodus, un film philippin à effets spéciaux.