S K : Les comédiens chinois sont tous très bons, très professionnels. Le premier film que j'ai tourné en Chine fut Center Stage (The Actress / Ruan Ling Yu, 1991). C'était à vrai dire « un film hongkongais tourné en Chine », et non pas une coproduction : tout le financement venait de Hong Kong. A cette époque, la Chine n'était pas encore très ouverte sur le plan des coproductions. Les démarches administratives furent longues et difficiles. Nous devions obtenir l'accord des autorités en leur soumettant le scénario. Les Studios de Shanghai nous ont ensuite permis de tourner dans leurs locaux, avec leur matériel. Quant à Lan Yu, ce fut dès le départ un projet « underground », aussi bien par son sujet (l'homosexualité) que par son mode de production (nos financiers ne connaissaient rien au cinéma). Il était clair que les autorités chinoises ne nous auraient pas permis de tourner un tel film au grand jour.
Depuis quelques années, la Chine est beaucoup plus ouverte aux coproductions avec l'étranger. Il y a de nombreuses explications. On peut dire que les autorités chinoises veulent attirer aussi les investissements étrangers dans le secteur du cinéma. On peut dire encore que le potentiel du marché chinois ne laisse pas indifférent. Les Chinois veulent aussi apprendre et faire des progrès en matière de production cinématographique grâce à la collaboration avec les étrangers. Aujourd'hui, il n'est plus rare de voir des films coproduits par les Chinois et les Hongkongais, voire même des productions sino-taiwano-hongkongaises. Dans ce type d'associations, chaque partie apporte son savoir-faire et ses moyens : la Chine a les studios et les décors naturels, les Hongkongais financent et amènent les stars de l'île, etc. De nos jours, grâce à cette ouverture économique dans le secteur du cinéma, les cinéastes chinois ou hongkongais trouvent plus de sources de financement pour leurs projets : ils peuvent être produits par des Chinois, mais aussi par des Français, des Japonais… Globalement, il y a une plus grande dynamique en matière d'ouverture et de coproduction en Chine.
Prenons par exemple le film que je viens de tourner, The Everlasting Regrets, avec Sammi Cheng, Tony Leung Ka Fai, Daniel Wu. Au départ, c'étaient les producteurs chinois qui m'ont contacté : ils venaient d'acheter les droits d'adaptation du roman [écrit par Wang Anyi – ndlr.] et voulaient que je le réalise. Ils comptaient sur moi pour attirer les grandes vedettes sur le projet et trouver des partenaires financiers à Hong Kong. A l'arrivée, c'est un film financé à la fois par des Shanghaiens et des Hongkongais, avec des comédiens de l'île et du continent [Hu Jun, Su Yan… - ndlr.], très représentatif des coproductions actuelles. |