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Duel    (1971)
 Après une violente bataille de gangs et la mort de son père (Yeung Chi Hing), chef de triade, un jeune homme (Ti Lung) décide de porter la responsabilité du carnage pour protéger son clan. Une seule issue s’offre à lui : s’enfuir à l’étranger.
Recyclé comme docker, il est un jour la cible de tueurs. Cette attaque incompréhensible le pousse à retourner à Hong Kong pour découvrir qui a commandité le contrat. Il constate alors, effaré, que son clan s’est allié avec les rivaux qui ont assassiné son père, que son frère (Ku Feng) est devenu un clochard ivrogne et que sa fiancée (Wang Ping) travaille dans une maison close. Il ne tarde pas à s’attirer les foudres de ses anciens amis… (DOV)


 Quand un réalisateur peut se vanter d’une carrière aussi fournie que celle de Chang Cheh, deux évidences s’imposent : il a eu de l’aide d’un certain nombre d’assistants, et il s’est inévitablement répété à un moment où un autre. Ces deux affirmations s’appliquent tout à fait au cinéma de celui qu’on surnommait l’ogre de Hong Kong. Cette sensation de déjà vu s’illustre avec plus de force encore dans la transition évidente de ses wu xia pian d’origine vers les films de kung fu shaolin, puis aux acrobaties de cirque des Venoms. Le réalisateur a en effet surinvesti chaque genre jusqu’à ne plus savoir comment apporter sa pierre à l’édifice, ce qui lui imposait de changer le ton de ses œuvres pour conserver une certaine fraicheur, qui fut à l’origine de son succès lorsqu’il dépoussiéra les genres en vogue à l’époque où les stars David Chiang et Ti Lung explosaient devant sa caméra. Comme son poulain John Woo, Chang Cheh a eu à cœur de construire ses récits autour de thématiques chevaleresques telles que l’honneur et l’amitié virile, qui au vu de sa filmographie, lui étaient chères. Et comme son ancien protégé, il est arrivé que l’Ogre ne se serve de ses thématiques que pour justifier les déferlements de violence les plus spectaculaires, sans réel souci de bâtir une intrigue inoubliable. The Duel fait partie de ses films, moins déterminants dans sa carrière, mais loin d’être dénués de qualité. Si Deadly Duo pouvait être considéré comme un New One-Armed Swordsman bourré d’action mais dénué d’une réelle intensité dramatique, The Duel est un peu un Vengeance ! sous hormones.

Cette fois, pas de lutte d’un homme seul qui remonte un à un tous les échelons d’une organisation criminelle au risque de sa vie pourtant. Mais ce sont une fois de plus les poignards qui sont préférés aux sabres, et l’intrigue se déroule à nouveau au début du vingtième siècle, loin des chevaliers errants qui ont rendu des acteurs comme Ti Lung et David Chiang célèbres. Réputé pour être l’acteur préféré de l’ogre, et véritable star de Vengeance !, ce dernier est cette fois en retrait au profit d’un Ti Lung dont le regard n’a rien perdu en intensité depuis son inoubliable prestation dans Dead End. L’intrigue, moins travaillée, est une plongée au cœur des triades, où les règlements de compte entre « familles » annoncent déjà les mélodrames dont John Woo se fera le spécialiste à partir de A Better Tomorrow. Malheureusement, si le rythme est très élevé, on regrettera l’absence d’une atmosphère claustrophobique digne de ce nom, et les décors, très réussis, ne servent plus à installer l’ambiance, mais sont uniquement une nouvelle occasion pour le héros de verser le sang des ennemis. Car tout est prétexte au combat, ce dont on ne se plaindra pas, tant les chorégraphies de Tang Chia et Yuen Cheung Yan dégagent une rage et une intensité encore palpables aujourd’hui. Les combats se font en groupe(s) (excepté le duel auquel le film doit son titre), et l'ogre de Hong Kong s'en donne à cœur joie dans la surenchère d'hémoglobine. Les affrontements de type combat de rue ont l’avantage, lorsqu’ils sont effectués à coups de poignards et de machettes, de moins vieillir que les combats plus techniques au sabre, ou les combats à mains nues. C’est d’autant plus vrai lorsque Ti Lung est l’acteur principal. Contrairement à David Chiang, l’acteur est toujours extrêmement crédible dans ses scènes d’action, alliant une grande souplesse à une sensation redoutable de puissance. Son côté mauvais garçon au regard franc de l’époque suffit d’ailleurs non seulement à imposer son charisme, mais aussi à rendre son personnage vivant, ses tatouages étant utilisés de façon convaincante.

A l’opposé, David Chiang, qui, comme dans Deadly Duo ou The Pirate n’apparaît que peu, joue une nouvelle fois un personnage équivoque, aux motivations parfois opaques, et au rictus permanent des plus insolents. Moins à l’aise dans les scènes d’action, à cause de son allure frêle et de ses mouvements peu assurés, il reste toujours plus crédible un couteau à la main qu’en échangeant des coups de poing avec Ku Feng ou en maniant le sabre en grimaçant. Si l’alchimie entre les deux acteurs est toujours présente, et qu’on retrouve les seconds rôles habituels, on sent bien que toute l’attention est portée sur un Ti Lung dont la présence et la qualité du jeu aurait tout à fait pu faire un rival de Bruce Lee, même si son kung fu n’était pas comparable. The Duel reste malheureusement un véhicule moins attrayant que Vengeance ! pour vendre un acteur. Excellent en termes de divertissement pur, grâce à ses combats violents et son rythme trépidant, il reste avant tout une tentative de capitaliser sur l’ambiance unique de Vengeance !, sans bénéficier de l’ambiance de ce dernier. Outre le scénario anecdotique, la réalisation est également nettement moins inoubliable. Le climax est d’ailleurs tout à fait significatif de ce manque de maîtrise général. Se déroulant après ce la résolution de ce qui constitue la fondation émotionnelle du récit, il semble sans aucun rapport avec l’intrigue et créé un décalage proche de la parodie. Comment se sentir investi par la mort (inévitable) des protagonistes quand tous les enjeux ont disparu ? Chang Cheh en a d’ailleurs certainement conscience, puisqu’en plus de tenter de gagner le concours du film le plus sanglant, il va faire massacrer TOUS les personnages sans exception (un choix qui ne constitue pas une grande surprise et dont la connaissance ne gâchera pas la film), et plus un seul acteur ne tiendra debout lorsque l’annonce de la fin sera faite. On n’est pas loin de la futilité des massacres en série du sympathique mais mauvais Shanghai 13, si ce n’est que la mise en scène reste très soignée et ici, et d’une grande efficacité, à défaut de s’illustrer par une narration puissante.

Si The Duel n’a pas trouvé dans le cœur des fans de l’ogre la même place que Vengeance ! ou La Rage Du Tigre, c’est parce qu’il constitue un excellent mais éphémère divertissement, loin de l’impact émotionnel inoubliable des classiques du réalisateur. A voir pour se défouler dans un joyeux festival d’égorgements.
Léonard Aigoin 12/2/2010 - haut

City Under Siege    (2010)
 Un clown (Aaron Kwok) et ses partenaires d'un cirque se retrouvent avec des pouvoirs extraordinaires après avoir inhalé par accident un gaz toxique japonais datant de la Seconde Guerre Mondiale. Ils décident alors de mettre la ville à sac.... Seul le clown, qui a réussi à garder son côté humain pourra les arrêter.

 Avoir les moyens de ses ambitions est toujours un départ positif pour un film. Ce qui ne veut pas dire que l’argent soit toujours source de réussite en termes de qualités artistiques bien sûr. Si on se réfère au Dream Home d’Edmond Pang, on constate que le réalisateur, en déclarant qu’il allait livrer le premier slasher de Hong Kong disposait d’un savoir faire largement suffisant pour donner au public un spectacle tout à la fois primaire et d’une grande intelligence, mélangeant hémoglobine et qualité d’écriture avec virtuosité, sans pourtant donner l’impression d’être un gros film commercial au budget pharamineux. L’annonce du City Under Siege de Benny Chan était assez différente, puisqu’on nous promettait un film de super-héros destiné à rivaliser avec les grosses productions hollywoodiennes. Que l’on aime ou non le cinéma américain, il est difficile de nier que ces dernières années l’usine à rêves à donner au public un nombre impressionnant de films de super-héros d’une grande qualité. En donnant carte blanche à des artistes comme Christopher Nolan ou en adaptant les écrits d’une grande densité d’un Alan Moore, les résultats ne pouvaient être que bons. Et si la production de films super-héroïques connaît un enthousiasme si grand, ce n’est pas uniquement à cause des chiffres du box-office, mais bien parce que les univers dépeints impressionnent, tant visuellement que narrativement. Tim Burton avait ouvert la voie en montrant avec son Batman en 1989 que les récits de justiciers masqués n’étaient pas réservés qu’aux enfants et aux adolescents, mais qu’il était tout à fait possible de créer des univers personnels et riches. L’aspect divertissement pur n’est jamais loin, mais les films de super-héros américains ont tout de même gagné leurs lettres de noblesses, une victoire qui culmina lors des oscars avec la nomination à plusieurs reprises de The Dark Knight de Christopher Nolan.

A Hong Kong, le genre a connu quelques timides déclinaisons, comme The Flying Mr. B de Wong Jing, mais généralement, les « super-héros » de l’ex-colonie ne portent pas d’uniforme et n’ont pas grand-chose à voir avec un Spider-man par exemple. Leurs exploits restent surhumains, comme le prouvent les prouesses d"hklink type=personne>Andy Lau dans Saviour Of The Soul et sa suite, ou plus récemment, celles du trio Donnie Yen, Nicholas Tse, Shawn Yue, dans le décrié Dragon Tiger Gate. Une spécificité qu’on retrouve néanmoins dans beaucoup de films d’action, en particulier les wu xia pian câblés. Et si les films cités bénéficient d’une esthétique surréaliste, en particulier dans le travail sur la lumière et les couleurs, City Under Siege est bien plus commun de ce point de vue. Hormis une introduction sous forme de flashback aux teintes sépia, la réalisation reste efficace sans se montrer inoubliable. Benny Chan est un très bon artisan, mettant en scène et montant ses films de façon dynamique, mais il lui manque la vision qui ferait de lui un artiste plutôt qu’un technicien. Une affirmation que la première scène, qui rappelle dès les premiers plans l’introduction du X-men de Bryan Singer, peine à contredire. On pensera également au début du Hellboy de Guillermo Del Toro, avant que l’explication des pouvoirs à venir de nos protagonistes ne soit faite par l’intermédiaire d’un clone raté du monstre vert Hulk. Difficile d’imaginer le palmarès du réalisateur en se fiant à cette scène. Mais ce ne sont que les premières marches de la drôle de descente en enfer que constitue City Under Siege. Car n’est pas Dante qui veut. Et si le poète Italien démontrait une imagination débordante dans sa comédie, on rit plus du film de Benny Chan que de ses tentatives pathétiques de faire de l’humour.

Si les quelques pétards censés donner l’impression d’une explosion ont pour but de se moquer des moyens démesurés déployés dans certaines grosses productions pour des scènes de quelques secondes, Benny Chan est un génie. En revanche, si c’est avec ce genre d’effet qu’il compte lancer sa gamme de films au rendu digne des plus grosses machines de guerre Hollywoodienne, il risque fort d’être considéré comme le Uwe Boll asiatique. Car on ne sait jamais s’il faut prendre ce City Under Siege au premier ou au second degré. Même les scènes bénéficiant de décors réussis parviennent à donner l’impression qu’on regarde un film fauché, comme la présentation de la troupe qu’on croirait tourner par Sun Chung en même temps que la scène de boite de nuit dans son City War, qui date tout de même de 1989. Cette impression d’être devant une production de la fin des années 80, ou au mieux du début des années 90, est renforcée par l’utilisation répétée d’effets spéciaux qui feraient passer les dagues volantes de Saviour Of The soul pour la pointe de la technologie numérique actuelle. S’il fallait résumer City Under Siege en une expression, ce serait « faute de goût ». D’un Collin Chou en motard hark rockeur has-been, à son costume de monstre aussi réussi que celui du directeur de Prison dans Story Of Ricky, en passant par la musique, d’une nullité qui n’a d’égale que sa mièvrerie, tout semble destiné à faire rire le public. Tout, sauf les plaisanteries, tellement puériles qu’on a presque la sensation que Benny Chan a écrit son scénario dans le but de détrôner Kevin Smith au poste de scénariste le moins capable de comprendre comment raconter une histoire. Car en plus de ne jamais avancer, le récit n’est jamais prenant. Il faut dire que le réalisateur n’a pas grand-chose à raconter, et parvient tout de même à enchaîner les clichés sur 1h48, alors que son scénario ne nécessitait pas plus de 30 minutes de film. On ne trouvera pas non plus de discours caché, ou de dénonciation réussie. On sourira devant l’utilisation de l’image d’Aaron, puisqu’il s’agit des seules scènes amusantes à dessein, mais le propos, qui se veut satyrique, est en retard de plus de 25 ans sur le Super Fool mettant en vedette Richard Ng. Si message il y a, ce serait plutôt une critique de l’humanité chinoise, comme on peut le voir lors du renvoi du personnage de Shu Qi, ou quand des marins jettent un homme à l’eau parce qu’il est malade (une scène visuellement aussi splendide qu’un jeu de PS2).

Ce n’est pourtant pas l’action qui empêche le récit d’être développé, puisqu’il faudra attendre trois quarts d’heure avant d’assister à un réel affrontement. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que pour un héros, Aaron n’a pas du suer beaucoup pour son rôle. Son personnage ne participe presque jamais à l’action, même lors d’un final aussi vite expédié que décevant. Les chorégraphies, qui se comptent sur les doigts d’une main, sont très inégales. Jacky Wu Jing se taille la part du lion en se réservant tous les meilleurs passages, offrant quelques échanges plus techniques, même si l’utilisation des câbles n’est jamais oubliée. Une fois de plus, on regrettera qu’un artiste martial de son niveau n’ait pas réellement l’occasion de démontrer ses capacités physiques, d’autant que ses affrontements avec Collin Chou promettaient des scènes d’anthologie. Finalement, le résultat est sympathique, mais anecdotique, et ne représente pas plus de 10 minutes du film. Et que dire du manque d’imagination lié à la transformation des personnages ? Ils sont plus rapides et plus forts. Tout comme Jacky Wu Jing et sa partenaire, eux aussi capables de bondir à plusieurs mètres de distance. Finalement, rien ne justifie de classer ce City under Siege dans la catégorie des films de super-héros, Aaron se contentant de sauver une inconnue au détour d’une scène. Alors qu’on aurait pu s’attendre à des adversaires variés, aux spécificités uniques, on constate que Benny Chan ne s’est pas fatigué et se contente de donner un aspect de plus en plus horrible et raté à nos monstres. Ce parti-pris discutable ne joue pas en la faveur de personnages peu attachants, et ce n’est pas le jeu irritant des principaux acteurs qui permettra une identification plus importante. Rarement Aaron Kwok aura été aussi irritant qu’ici, surjouant plus encore que dans Murderer, comme si sa vie en dépendait. La star a fait des choix de carrière aussi surprenants que peu pertinents ces dernières années, et on a du mal à imaginer que City Under Siege le remette sur le devant de la scène.

Mais il n’est pas seul en faute, et Collin Chou, qui se définit comme plus jeune, plus fort et plus cultivé que les stars actuelles, donne l’impression que sa culture s’arrête au Hulk interprété par Lou Ferrigno. Son jeu inhumain est mis en valeur de façon peu orthodoxe par une utilisation maladroite, pour ne pas dire ratée, du ralenti, associée à une direction d’acteurs douteuse. Les personnages féminins s’en sortent mieux : n’ayant rien à faire, elles n’ont pas l’opportunité de se ridiculiser. Shu Qi montre par contre un grand sérieux et semble avoir travaillé son rôle, même s’il est sans intérêt. Finalement, seul Jacky Wu Jing parvient à bien jouer, lui pourtant habitué aux grimaces les plus agaçantes, a enfin de la prestance avec sa barbiche, et reste sobre du début à la fin. On aurait aimé voir, au rayon des rares qualités, une esthétique réussie. Mais en plus d’être longuet, City Under Siege est d’une banalité visuelle déprimante. Dragon Tiger Gate n’était pas un grand film, mais le jeu sur les couleurs, et sur la lumière en faisaient une expérience originale. Et à moins d’être masochiste, il ne vaut mieux même pas comparer le film de Benny Chan au Scott Pilgrim d’Edgar Wright, d’une ingéniosité visuelle incroyable, mettant en scène des combats bien chorégraphiés avec beaucoup de dynamisme sans jamais sacrifier la lisibilité, et parvenant même à ajouter des bruitages qui ne dépareilleraient pas dans la série Batman avec Adam West, pour un résultat pop brillant.

City under Siege est un film prétentieux qui n’a donc pas les moyens de ses ambitions, mal écrit, réalisé sans génie, et bourré ce tics de montage navrants, qui parvient tout de même à faire rire grâce à des scènes surréalistes, comme ce passage où Shu Qi explique ce qu’est l’amour à un Collin Chou déchaîné, candidat à l’élection du plus mauvais acteur du monde.

Un film à ne voir que préparé.
Léonard Aigoin 12/2/2010 - haut

Golden Chicken    (2002)
 Un prostituée raconte des tranches de sa vie.


 Le cinéma de Hong Kong et l'Histoire de la colonie ont depuis longtemps, au travers des films, témoigné des liens qui les rattachaient l'un à l'autre. Sans forcement faire une analyse socioculturelle poussée, il a toujours semblé difficile de dissocier les évènements qui ont bouleversé la société hongkongaise à la fin du 20° siècle et au début du 21° des films produits par l'industrie locale. Cette idée se montrait de plus en plus prégnante au travers des films intimistes ou plus "commerciaux" de la nouvelle vague et d'une bonne partie de la production situant son action dans un Hong Kong contemporain. Difficile en effet, dans un contexte où le "monde" se réduit à une ville (certes cette ville subit les influences de la Chine mainland ou de l'occident mais n'en reste pas moins un monde clos) de ne pas retrouver dans les films locaux des marques de la société et de son influence. Golden Chicken fait partie de cette catégorie de films, plus "frais", qui abordent plus directement les problèmes de la société hongkongaise, sous un angle plus social.

Un soir, Kum, une prostituée (incarnée par Sandra Ng), se fait braquer par un homme démuni (Eric Tsang), mais tous deux se retrouvent coincés dans l'antichambre de la banque à cause d'une panne de courant. Kum va alors raconter sa vie à notre joufflu préféré. A partir de là, Golden Chicken (tout comme sa suite) dresse un portrait de la ville de Hong Kong, ou plus précisément de son Histoire. Politique et nostalgique, le film narre vingt années de l'Histoire de la colonie au travers du parcours de Kum. Au cours de cette période Samson Chiu ne manque pas d'évoquer les différents évènements ayant marqué la fin du siècle (le massacre de Tian Anmen, la rétrocession ou encore les séries TVB des années 80 avec Chow Yun Fat ou Tony Leung Chiu Wai). Ces deux décennies, marquées par des hauts et des bas laissent entrevoir l'affection qu'a le cinéma local pour Hong Kong et ses modes de vie, avec tout ce que cela comporte de clichés (cela va des parties de Mah-jong à l'habituel tycoon). Et ces éléments ne sont pas à négliger puisque dans ce film, l'argent est le nerf de la guerre. Si cette succession de rencontres entre les personnages marquent dans l'ensemble les différents souvenirs de la vie de Kum, le problème central reste le même: l'économie. Ces rencontres qui jalonnent la vie de Kum permettent au travers des nombreux seconds rôles et caméos de luxe (Eric Tsang, Tony Leung Ka Fai, Hu Jun, Andy Lau) de dresser un panorama intéressant et diversifié de la vie hongkongaise et de ses habitants.

Si cet aspect décousu du scénario aurait put faciliter la narration sous forme d'une succession de sketchs, il n'en est rien. Samson Chiu suit la trajectoire de son personnage et les enjeux qui la poursuivent (la réussite financière et la quête de l'amour) avec rigueur. Rappelons malgré tout qu'il s'agit d'une comédie. Et si l'humour aurait pu là aussi justifier une structure à sketches, le film suit cette idée de destinée, qui avance à tâtons, sans vraiment savoir ce que le futur va apporter, malgré une échéance qui pèse sur les consciences. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui fait que l'on ne se retrouve pas devant un Mo Lai To mais une comédie légère, douce amère, qui aurait pu tendre à la comédie dramatique entre les mains d'un autre réalisateur et sans l'énergie d'une Sandra Ng particulièrement attachante.

Finalement, de quoi parle le film ? Certes, d'une prostituée et de ses rencontres, mais ce qu'aborde véritablement le film ne serait-ce pas de la mémoire ? La mémoire d'une population qui se laisse porter par son Histoire, et des souvenirs qui restent. Ce dont le film parle, c'est de l'amour indéfectible du peuple hongkongais pour sa ville.
Anel Dragic 11/23/2010 - haut

Ghost In Me    (1992)
 Orson Welles détestait deux choses: "les voleurs et les fils de putes". Il y a donc fort à parier qu'il aurait détesté les fantômes de ce film. Car c'est à peu près tout le sujet de ce Ghost in Me, énième comédie fantastique mettant en scène ces revenants produit dans l'ancienne colonie. Billy Lau incarne ici un gars moyen qui un soir se fait piéger par une bande de spectres causant son accident. A ce moment, son âme est projetée hors de son corps et un des esprits maléfiques en profite pour lui voler son apparence. Heureusement, dans l'entourage du bonhomme, il y avait Wu Ma, un exorciste qui passe plus de temps à jouer à la famicom, mais aussi ses deux amis incarnés par Sandra Ng dans un rôle habituel de femme qui s'en prend plein la tronche et Stanley Fung qui sort fraichement de prison. Une belle brochette de personnages dignes de toute bonne comédie fantastique hongkongaise... ou presque!

Si un tel postulat peut allécher, le spectateur déchante très vite face au résultat carrément médiocre de l'ensemble. Sans rythme, sans originalité, les minutes s'écoulent sans que l'on ne trouve finalement notre bonheur. Il y avait pourtant de quoi faire avec cette ghost comedy mais force est de constater que le scénariste a fait le minimum syndical, certainement pour suivre un budget réduit lui aussi au dessous du seuil de pauvreté. Certains runnings gags transpirent le déjà vu (Sandra Ng qui joue les femmes suicidaires avec une fausse lame rétractable pour se tirer des mauvaises situations) et les sourires esquissés se comptent sur les doigts d'un manchot.

Il y avait véritablement quelque chose à faire avec cette idée des permutations de corps, mais non, le scénario se montre totalement vain. Jamais aucune des idées qui parsèment le métrage n'est bien exploitée. Il en va de même du background des personnages. Prenons Stanley Fung, qui a des problèmes avec son ex-femme et son fils. Tout cela n'aboutit à rien et se montre finalement totalement inutile. Lee Man Choi, le scénariste, était visiblement trop débordé en cette année 1992 au cours de laquelle il collaborera à quelques script bien meilleurs. Le casting est là pour cachetonner, ou alors pour faire plaisir à Stanley Fung, mais il faut se faire une raison, personne ne semble véritablement y croire. Tout au plus on pourra remarquer l'aisance de Billy Lau à passer du rôle de l'idiot moyen à un fou furieux possédé.

Stanley Fung, l'autre célèbre moustachu des lucky stars, réalise ce métrage avec un manque d'idées assez déconcertant. Le métrage n'est déjà pas rythmé, sans originalité, mais aussi sans inventivité visuelle, et là c'est le drame. Le film a visiblement été filmé en trois jours sur le pallier de l'appartement à Stanley Fung, chez ses amis, et un petit peu en lisière des bois... On était tout de même en droit de s'attendre à un peu mieux.

Pour conclure, disons qu'en dehors de son quatuor d'acteurs (qui sont déjà peu impliqués), le film est vraiment un bas de panier de la ghost comedy. A réserver aux extrémistes du genre, les autres, passez votre chemin.
Anel Dragic 11/23/2010 - haut

Carry On Pickpocket    (1982)
 Trois pickpockets rencontrent un escroc qui prétend être inspectrice de police et leur demande de l’aider dans une enquête. Ils doivent donc voler des diamants pour elle. Heureusement, quand sa véritable identité sera révélée, les trois voleurs restitueront les pierres (c’est la moindre des choses !).

 Après avoir redonné un beau coup de neuf au kung fu (et plus spécifiquement à la kung fu comedy), Sammo Hung se lance en 1982 dans la réalisation de cette comédie d'action urbaine qui marque une réussite de plus dans sa filmographie. Dans un cadre contemporain pour l'époque, Sammo Hung et Frankie Chan incarnent un duo de pickpockets sympathiques. Sammo s'éprend de Deannie Yip qui est en fait une flic enquêtant sur des gangsters en possession d'un très joli lot de diamants. La suite, vous l'aurez comprise...

Carry on Pickpocket est un film très attachant. A cause de son casting d'abord, grâce à son cadre ensuite (les eighties). Difficile lorsque l'on aime cette tendance de ne pas succomber au charme d'un film pareil. Sammo avait le chic pour rassembler de gros castings, et le film ne faillit pas à cette tâche. Les seconds rôles font plaisir à voir et si l'on n'atteint pas l'affiche prestigieuse d'un Millionaire's Express ou d'un Eastern Condors, quelques second rôles ou apparitions comme Richard Ng et Nat Chan sont toujours bons à prendre.

Le film est emprunt d'une légèreté totalement caractéristique des comédies d'action hongkongaise des années 80. Tendant vers le buddy movie, il témoigne de la bonne alchimie à l'écran de Sammo et Frankie qui se retrouvent après le chef d'oeuvre Prodigal Son. Beaucoup de gags, de l'humour typiquement cantonais, les personnages ne ratent pas une occasion de se lancer des piques. Dommage que leur collaboration n'ait pas été beaucoup plus exploitée après ce film, d'autant qu'ils ont un côté complémentaire à la Laurel et Hardy. Les scènes caractéristiques de l'époque s'enchainent. Cela va d'une soirée dans un night club ou de la scène d'action finale sur un bateau ou le duo affronte Dick Wei. Les séquences d'action sont particulièrement réussies même si l'on peut remarquer quelques accélérations caractéristiques du réalisateur. Rien qui ne vient entacher la fluidité des scènes en question, bien au contraire.

Sammo est un perfectionniste quand il s'agit de chorégraphier l'action et le mouvement. Si Jackie Chan a fait référence au célèbre Buster Keaton, il n'est pas étonnant de voir Sammo citer Charlie Chaplin au cours d'une scène de danse avec des petits pains tant le lien de filiation est visible entre les deux. La manière qu'a Sammo d'utiliser l'espace et de donner à chacun de ses mouvements une précision hors norme étonne. Les scènes de pickpocket sont à ce titre assez incroyable. Par l'usage de ralentis, Sammo décompose magistralement les mouvements et les chorégraphies de ces vols de rue. Ces séquences annoncent le Sparrow de Johnnie To presque trois décennies avant et n'ont rien perdu à leurs qualités.

Alors, certes, le film n'est pas parfait. Il y a bien quelques défauts, mais on a affaire à un film totalement hongkongais dans son mode de production et donc d'écriture (ce qui n'est pas pour me déplaire). Le métrage garde un bon rythme et laisse peu de place à l'ennui. Il est dès lors très facile de faire abstraction de ces défauts pour en apprécier la substance.
Anel Dragic 11/23/2010 - haut

Love In A Puff    (2010)
 Depuis la loi sur l'interdiction de fumer dans les lieux clos, les salariés ont pris l'habitude de prendre leur "pause cigarette" dans les petites ruelles près de leurs entreprises. Des amitiés, des rencontres se créent. Chi Ming (Shawn Yue) et Chun Kiu (Miriam Yeung) se croisent souvent dans ces endroits. Des sentiments naissent entre eux, mais ils n'osent pas franchir le pas.

Un jour de 2009, le gouvernement décide d'augmenter fortement le prix des cigarettes. Comme beaucoup de fumeurs invétérés, Chi Ming et Chun Kiu doivent alors partir très loin pour trouver les paquets les moins chers. Ils finissent par se croiser lors de leurs déplacements. Oseront-ils enfin franchir le pas ?


 Avec un titre comme Love In A Puff, Edmond Pang Ho-Cheung n’avait même pas besoin de présenter son film pour que l’on comprenne la catégorie dans laquelle il était à classer. L’amour dans une bouffée, ou plutôt le temps d’une bouffée, voilà qui semble promettre une histoire inscrite dans un contexte léger, évoquant un quotidien dans lequel chacun pourra se reconnaître. Mais le réalisateur va brouiller une fois de plus les pistes, un jeu dont il s’est fait le spécialiste, tant chacun de ses films témoigne d’une identité unique, même si son style reste reconnaissable entre mille. Après la lecture d'un texte qui présente la loi relative aux zones fumeurs à Hong Kong, le spectateur est confronté à un générique aussi surprenant que déstabilisant : des noms affichés dans une écriture sanguinolente, une musique tonitruante, les lumières défaillantes d’un parking sous-terrain… Pourtant, il ne s’agit pas d’une scène coupée de Dream Home ! Une question qu’il paraît légitime de se poser, tant la réalisation, constituée de plans d’ensemble au mouvement lent s’inscrit dans la continuité du précédent film du réalisateur. Certaines images bénéficient d’ailleurs d’une esthétique surprenante et réussie, comme le reflet d’un homme sur le capot humide d’une voiture. Cette atmosphère angoissante va donner lieu à un double twist amusant, qui n’est pas sans rappeler le genre de fin qu’on rencontrerait dans une série comme Les Contes de la Crypte ou Les Maîtres de l’Horreur.

Après cette introduction très bien ficelée, le réalisateur nous plonge dans ces fameuses pauses cigarettes qui servent de point de départ à l’intrigue, au gré de plans caméras à l’épaule qui collent au plus près des personnages. Cette mise en scène naturaliste tranche avec l’esthétique léchée d’un Dream Home aux plans plus posés. Mais surtout, elle confère une atmosphère intimiste à la discussion, qui est tout à fait dans la logique du propos. L’impression de vie n’en est que plus grande, ce qui permet aux différentes anecdotes et aux nombreux ragots d’illustrer de façon convaincante les discussions de la vie de tous les jours. La qualité de l’écriture, constante chez Pang, est particulièrement mise en valeur dans les dialogues, qui ne sont jamais trop rédigés. Il y a d’ailleurs fort à parier que le réalisateur a laissé à ses acteurs l’opportunité d’improviser un peu autour de leurs répliques, tant les échanges paraissent naturels. Les personnages sont rapidement attachants, même si on ne sait que peu de choses de la plupart d’entre eux. Dans un premier temps, ce sont les détails vestimentaires qui leur confèrent une identité : le cuisinier, le livreur, la vendeuse en cosmétique. On peut y voir une facilité scénaristique, jouant sur les préjugés liés à chaque profession, et estimer que le film véhicule l’idée selon laquelle la catégorie socioprofessionnelle s’inscrit dans les théories du déterminisme social de Bourdieu. Mais l’auteur évite ce piège en n’enfonçant jamais de portes ouvertes. Ainsi n’entendra-t-on jamais de plaisanteries immédiatement liées au métier de l’un, ou à la profession de l’autre. Love In A Puff n’est ni une comédie caricaturale, ni un film à tendance sociale, le propos est tout autre.

L’insertion de quelques interviews des protagonistes filmés dans un style documentaire pourrait en effet faire penser que Edmond Pang Ho-Cheung va laisser éclater, à travers ses personnages, son opinion sur la loi. En vérité, ce procédé, employé à plusieurs reprises mais sans excès, rappelle davantage les témoignages de couples qui ponctuaient les rencontres entre Billy Crystal et Meg Ryan dans Quand Harry Rencontre Sally de Rob Reiner. Sauf qu’ici, ce sont les principaux intéressés qui s’expriment, qui confient leurs doutes, leurs craintes, leurs espoirs, leurs joies, nous permettant de comprendre leur état d’esprit sans imposer de voix off qui détaillerait la moindre pensée. Loin de casser le rythme, ces interventions renforcent la sensation de vrai qui se dégage du film. Et s’il y a une chose vraie dans l’œuvre du réalisateur, c’est son amour pour sa ville, qu’il aime filmer sans jamais la surexposer. Contrairement à un Johnnie To qui a parfois tendance à articuler ses films davantage autour d’une visite guidée que d’une histoire, Pang l’utilise pour illustrer son propos ou dépeindre les sentiments de ses héros. Et si les plans sur les buildings sont moins nombreux que dans Dream Home, ils expriment parfaitement la modernité de l’intrigue par leur architecture aseptisée.

Car au-delà du contexte inspiré par la loi, Love In A Puff est une œuvre inscrite dans son temps. Les décors sont modernes, mais les dialogues, très drôles et très référencés (le nom d’Angelina Jolie sera prononcé plusieurs fois) le sont aussi. A ce titre, il est intéressant de comparer le gweilo chez Pang à celui que nous a subtilement présenté Wilson Yip dans Ip Man 2. Si sa présence est néfaste au personnage, ce n’est pas parce qu’il est le diable incarné, brutal et vociférant. Concrètement, il n’est d’ailleurs pas dépeint comme un monstre, même si Shawn Yue ne le décrit pas en termes flatteurs. C’est la situation qui est la cause de son irritation plus que la nationalité du personnage. La présence et l’évocation de l’étranger ne parait jamais agressive, et donne à des plaisanteries très amusantes. On apprend par exemple que « les français sont très ouverts », et on a même le droit à des jeux de mots dans la langue de Molière. La multiplicité des points de vue permet une nuance tout à fait bienvenue, y compris dans l’utilisation de la technologie. Une grande partie des dialogues se fait en effet par SMS, et on se rencontre par Facebook, en trafiquant sa photo de profil. La légèreté de l’ambiance est à l’image de la légèreté des rapports, les personnages se croisent et s’entrecroisent au hasard d’un achat (…de cigarettes), se suivent et se poursuivent.

La romance est traitée avec beaucoup de pudeur, et évite le passage tragique obligé de toute comédie romantique qui se respecte. Les sentiments naissants sont manifestes sans qu’aucune grosse scène d’amour ne nous soit imposée. Au contraire, c’est lors des passages les plus anodins qu’on en apprend le plus sur le couple potentiel de Miriam Yeung et Shawn Yue. L’alchimie entre les deux acteurs est évidente, et ils interprètent leur personnage avec beaucoup de naturel. On regrettera juste que leurs rôles prennent le devant de la scène. Les amis rencontrés lors des premières pauses ne font que de la figuration alors qu’on pouvait espérer les voir contribuer davantage à l’intrigue. Conscient qu’il serait dommage de mettre de côté la bonne humeur installée au début du film au profit de la romance pure et simple, le réalisateur donne suite à l’une des premières scènes pour un résultat très drôle. C’est d’ailleurs l’humour qui reste la plus grande force de Love In A Puff. On ne rit pas à gorge déployée, et les gags restent plutôt fins, mais la bonne humeur est constante, et appuyée par une bande originale enthousiasmante sans jamais être trop envahissante.

Le montage s’appuie sur l’inscription dans le temps, en affichant la date pour que le spectateur soit en mesure d’évaluer l’évolution de la relation, mais on a droit à des transitions plus habiles, comme le passage du déménagement évoqué en trois scènes dont l’enchaînement est très réussi. La narration est plus accentuée sur les personnages que sur une histoire très développée, ce qui renforce l’impression de « vrai », mais n’oublie pas de nous surprendre par quelques effets bienvenus et jamais exagérés. L’illustration d’un rêve est significative de ce parti-pris. Pas de monstres ou de scènes extraordinaires, mais un souvenir vague d’un acte surprenant sans être trop extravagant. Love In A Puff n’a pas d’autre prétention que de raconter la vie de Monsieur et Madame Tout Le Monde le plus simplement possible, et il réalise cette ambition avec succès, grâce à une réalisation soignée, une interprétation solide et des dialogues de grande qualité. Même les spectateurs peu portés vers les comédies romantiques sont susceptibles de passer un bon moment devant le film de Edmond Pang Ho-Cheung.

Pas une œuvre marquante comme Dream Home, mais un bon petit film, sincère et divertissant, dans lequel tout est soigné. Et c’est déjà beaucoup, car il serait dommage de ne se satisfaire que de « grands » films.
Léonard Aigoin 11/10/2010 - haut

Black Falcon    (1967)
 Un homme d’action au charme irrésistible Chang Shieh Chieh (Paul Chang Chung) est engagé par une agence de détective pour séduire Julie Hu (Jenny Hu) afin de retracer son père le chef d’un cartel de gangster extremement dangereux les Faucons noirs. Des le départ toutefois ces derniers son au courant des intentions de Chang et cherche par tout les moyens a l’éliminer. Est-ce que Chang survivra aux attentats, parviendra t’il a retracer les faucons et arreter leurs opérations tout cela sans perdre l’affection de la ravissante Julie?

 Datant de 1967, Black Falcon est le troisième spy caper (spy : espion; caper : film de genre avec un degré d’humour) produit par les Shaw Brothers pour capitaliser sur l’engouement mondial envers les films James Bond (voir Golden Buddha et Angel With The Iron Fists). C’est également le deuxième film de ce type dans lequel apparaît Paul Chang Chung qui le temps de quatre films joua pour les Shaw les Don Juan aux poings d’acier occupé à contrer les organisations secrètes de même qu’à secourir et séduire les jolie filles. Dans Falcon, ce rôle est tenu par l'Audrey Hepburn d’Asie Jenny Hu. Celle-ci joue le rôle d’une héritière qui se trouve prise en étau entre des gangsters et son amoureux agent secret.

Tout comme la trame de Golden Buddha évoquait un temps soit peu le classique d’Alfred Hitchcock, La Mort Aux Trousses, la trame de Black Falcon fait songer à celle de Charade un spy caper célèbre pour être le meilleur film à la Hitchcock non réalisé par le célèbre maitre du suspense. Le film mettait aussi en vedette Audrey Hepburn, ainsi que Gary Grant> vedette de La Mort aux Trousses. Toutefois, Black Falcon s’avère être en fait un remake d’un film à suspense Italien «Agente; 3S3 Passaporto per l'inferno » (Agent 3S3, Passeport pour l’enfer). Bien que l’action soit transposée de l’Europe à l’Asie, Black Falcon semble suivre très fidèlement l’histoire originale et ses nombreux épisodes de suspense et d’action. C’est ainsi qu’on y retrouve la scène de la jeune fille en fuite croisant un bon samaritain qui s’avère être un tueur à gages, la rencontre du héros avec la fille dans un bar et la bagarre qui s’en suit, l’attentat routier avec camions, l’affrontement du héros avec un géant et ainsi de suite. Comme c’est souvent le cas dans des productions asiatiques, le fait que le film soit en fait un remake d’une production occidentale n’est pas indiqué.

La pratique des Shaw Brothers d’emprunter la trame de spy caper étranger pour leur propre production vient probablement du fait qu’ils avaient peu d’expérience, voire d’affinité véritable dans ce type de cinéma. À en juger par leurs premier essais dans le genre, Golden Buddha et Angel With The Iron Fists les seuls éléments pseudo-bondien que les Shaw étaient capables de reproduire convenablement étaient limités aux décors futuristes des bases secrètes, et la haute couture portée par les personnages. Presque tout le reste, scénario, action, mise en scène et montage laissait passablement à désirer. Lo Wei le réalisateur de deux films n’avait lui-même presque jamais tourné d’autre chose que des drames.

Pour Black Falcon par contre les Shaw ont engagé Takumi Furakawa un metteur en scène japonais spécialiste en film d’action (il avait déjà été un assistant pour Akira Kurosawa). Ce fut là un choix des plus judicieux puisque Furakawa réussit à pousser le film à un calibre filmique un peu plus relevé que ses prédécesseurs grâce à un indéniable flair visuel, un rythme narratif bondissant et un montage vif. En conséquence, les nombreuses scènes d’actions du film, qu’il s’agisse des poursuites, des bagarre ou des fusillade avaient un certain brio.

Ceci dit, Black Falcon avait beau être un spy caper avec plus de vigueur et de flair filmique, il n’en demeure pas moins qu’il souffrait d’un gros problème : le manque d’envergure des personnages et d’extravagance dans les péripéties. Malgré son charme, son assurance virile et un certain humour décontracté, le Don Juan aux poings d’acier joué par Paul Chang n’en reste pas moins un sous-James Bond sans grande personnalité. Quant aux faucons noirs, si au départ ils sont présentés comme une redoutable organisation criminelle (ils ont une base secrète et une hiérarchie numérotée), leur compétence et leur crédibilité s’effritent au fur et à mesure que le film avance, ne parvenant pas à éliminer le héros, ce qui compromet le suspense. Les tentatives sont nombreuses et rocambolesques (attentat routier, tueur géant, vin empoisonné) mais semblent être exécutées par des malfrats de troisième ordre plutôt que par des maitres es criminels. Comment prendre au sérieux un comparse vêtu en marin pirate, cache œil compris, qui apparaît au beau milieu du film, c’est tout dire.

La sale gueule des lieutenants joués par Wong Hap et Tien Feng est l’atout le plus menaçant des gangsters, de même que l’aura sexy et vénéneuse de la femme fatale jouée par Margaret Tu Chuan qui est le vrai boss du gang. Quand les sous-chefs s’affrontent pour les beaux yeux de la belle pendant que le héros pénètre sans grande difficulté dans leur repère, force est de constater que les redoutables Faucons noirs ne valent pas grand chose. Au lieu d’un gros affrontement épique, spectaculaire et plein de suspense Black Falcon finit par se dénouer avec une rixe dans le boudoir de la femme fatale, ce qui n’est guère édifiant pour un spy caper. Le travail de réalisation n’est pas en cause dans cette lacune du film, c’est le rendu des personnages et des situations qui ne lèvent pas l'histoire vers le haut.

C’est Takumi Furakawa lui-même qui est crédité pour le scénario, mais sa marge de manœuvre dans son travail d’adaptation du film d’origine a du se trouver restreinte par la supervision des producteurs, les moyens à sa disposition et le casting des acteurs qui bien sûr ne relevaient pas de lui.

Les deux vedettes féminines du film, Jenny Hu et Margaret Tu Chuan sont les personnes qui manifestent le plus de charisme. Margaret n’apparaît qu’à mi chemin mais impose facilement son personnage de femme fatale manipulatrice et ultra sexy. Sa scène de séduction avec Wong Hap est le moment le plus pétillant de tout le film. Jenny Hu a un certain peps dans son rôle d’héritière frivole mais elle se retrouve aussi contrainte par son rôle cliché de demoiselle en détresse. Son personnage prend aussi moins d’importance dans la seconde moitié du film alors que l’attention du film diverge sur celui de Margaret.

Bien qu’il y ait une amélioration par rapport aux productions précédentes des Shaw, Black Falcon n’en demeure pas moins une fois de plus un spy caper défaillant. Toutefois, pour un spectateur indulgent, le film peut quand-même passer pour un divertissement retro-kitch passablement amusant, rempli de bagarres, de rebondissements et de nombreuses beautés souvent courtement vêtues, le tout filmé avec flair. Même la séquence d’ouverture animée dans le style pop art a un charme entrainant. Les scènes d’action et de poursuite du film offrent aussi le petit plaisir de voir un cinéaste à l’œuvre en faisant en emploi très filmique du cadre, du montage et de la profondeur de champ.

Après Black Falcon, Furakawa a réalisé un autre spy caper pour les Shaw : Kiss and Kill, toujours avec Paul Chang. Ce dernier apparaît également dans Operation Lipstick avec Cheng Pei Pei et réalisé par Inoue Umetsugu le plus reconnu des réalisateurs japonais engagés par les Shaw. Toutefois Ces titres n’ont pas encore été vendus en DVD/VCD.
Yves Gendron 11/9/2010 - haut

Angel With The Iron Fists    (1967)
 L’agent 009 (Lily Ho) est charger de débusquer une dangereuse organisation criminelle; les anges noirs. Pour accomplir sa tâche elle embobine un séduisant bijoutier Cheng Tie hu (Tang Ching) affilier avec le gang. Même armée de son charme, de sa ruse et d’une panoplie de gadgets (incluant une sacoche pistolet, des lunettes infrarouge et un bijou caméra) elle aura pourtant forte a faire pour surmonté la méfiance d’un ange jalouse (Fanny Fan), et l’affection malsaine de la chef du gang (Tina Chin Fei). Elle doit aussi voir a ne jamais perdre la confiance de Cheng Tie Hu sur lequel repose son plan d’infiltrer puis détruire l’organisation de l’intérieur

 1967 pourrait être décrit comme l’année où James Bond a laissé son empreinte en Asie. D’une part parce que le dernier film de la série Bond : You Only Live Twice, se déroulait au Japon. D’autre part à cause des nombreux films d’espionnage et d’aventure produits pour l’occasion par les studios Shaw Brothers et inspirés du personnage et des conventions régissant les aventures du célèbre agent 007. Au total sept films ont été produits en dix mois. Angel With The Iron Fist est le premier d’entre eux (date de sortie 11 Janvier 67). Ce n’était pas là le premier film «pseudo bond» produit par les Shaw, il y a avait eu auparavant Golden Buddha sorti en mai 1965 mais ce film tenait tout autant des films de suspense d'Alfred Hitchcock (voir critique du film). Par contre Angel est le premier « spy caper » Shaw à mettre en scène un agent secret dûment numéroté. (spy caper= spy espion, caper: film de genre avec un degré d’humour).

Excepté que dans Angel l’agent secret n’est pas un « James » mais plutôt une « Jane » Bond ultra chic incarnée par la starlette montante Lily Ho. Comme les vedettes féminines dominaient le cinéma hongkongais dans les années 60, il était plutôt normal que les Shaw présente un agent secret féminin pour leur film d’espion. Toutefois Angel va plus loin encore puisque le grand méchant du film est également de sexe féminin, une dragon lady dirigeant une armée de femmes fatales et auprès desquels les hommes semblent confinée aux rôles de subordonnés.

Le film offre donc une étrange inversion du rôle des sexes par rapport aux Bond originaux. Alors que l’agent 007 accomplit habituellement ses missions à la dure (combats, intrusion secrète) l’agente 009 réussit la sienne par des artifices bien féminins (ruses, duperie, séduction). Même la plupart de ces gadgets sont déguisés en accessoires de femme. Bien qu’elle se batte ou utilise un pistolet à quelques occasions, ce n’est pas avec ces prouesses martiales qu’elle arrive à ses fins.

Cela ne veut pas dire que le rôle des hommes dans le film sont complètement marginalisés : le patron de l’agent 009 est un homme et elle est également pourvue d’un faire valoir avec le personnage du bijoutier chevaleresque incarné par Tang Ching qui même si il est dupé par l’héroïne n’en n’est pas moins le second protagoniste du film et n’hésite pas à se battre pour elle à de nombreuses occasions. Le rôle qu’il occupe est à peu près le même que les chevaliers-servants qui dans les Wu Xia Pian aident et la plupart du temps tombent amoureux de l’héroïne.

Angel with The Iron Fist a le même metteur en scène que Golden Buddha : Lo Wei (et aussi le même scénariste). Angel a donc à peu près la même série de défauts que son prédécesseur, soit une mise en scène et une narration manquant tant de rigueur que de zeste. Les personnages sont aussi superficiels et le scénario ne rend aucunement l’avantage au sexe de l’agent secret et de ses adversaires pour créer des dialogues un tant soit peu spirituels. Les scènes d’action sont assez variées et nombreuses mais la plupart du temps sont plus excitantes pour leur trame musicale plutôt que dans la manière dans laquelle ils ont été filmés ou chorégraphiés. Du lot, on pourrait quand même retenir la bagarre semi-comique dans le salon de coiffure (au cours duquel le comédien Lee Kwan dans un cameo surprise prend une volée), le duel de filles : 009 Vs une ange jalouse, dans laquelle elles se donnent des coups de karaté et se tirent les cheveux, le corps à corps implacable entre sbires pour les beaux yeux de 009 et la poursuite dans les égouts de la base secrète lors du dénouement.

A défaut de capturer le brio et l’humour de la série Bond, Angel réussit quand même à en reproduire un tant soit peu l’ambiance grâce à la trame musicale (consistant en des morceaux empruntés ou imités d’autres films Bond) de même que la direction artistique : avec les gadgets, les vêtements chics des personnages et les décors de la base secrète imitations redux de ceux créés pour les James Bond. Il faut aussi signaler le générique d’ouverture qui consiste en un dessin animé réalisé dans le style pop art des années 60 très en vogue à l’époque surtout dans les spy caper et qui donne au film un certain souffle dès le départ qui a tôt fait de se dissiper.

L’atout essentiel du film est sa vedette principale Lily Ho. A l’emploi des Shaw depuis 1965, cette dernière s’était faite remarquer dans des rôles secondaires, amenant le studio à la promouvoir comme vedette dans une série de films distincts dont Angel With The Iron Fists fut le premier à sortir dès janvier 67. Grande, élégamment maquillée de même qu'habillée en accoutrement haute couture Lily Ho est l’incarnation même de la grâce ultra chic. Le charme de Lily ne tient pas juste à son apparence mais au double jeu constant de son personnage une «Jane Bond» confiante, résolue et compétente jouant les jeunes filles vulnérables et émoustillantes. Un des jeux favoris du film est de faire souvent des gros plan sur le visage de l’actrice où les airs rusés du personnage perce derrière son masque frivole et vulnérable. Quoi qu’il arrive, l’Agent 009 contrôle toujours la situation et cela contribue à son attrait.

Deux bémols tout de même, malgré le titre du film « l’Ange aux poings d’acier » et bien que son personnage se batte souvent Lily Ho n’est pas une experte des plus convaincantes au corps à corps, elle est juste trop menue et pas véritablement athlétique. Aussi, au dénouement du film, l’agent 009 est piégé et a besoin d’être prise en charge par « son chevalier » pour s’échapper. A ce moment sans se transformer complètement en demoiselle en détresse, son personnage qui dominait chaque situation doit un peu céder le pas à son faire valoir dans un retournement quelque peu incongru étant donné le fait qu’elle l’ait constamment dupé depuis le début.

En tant que pastiche féminin et asiatique des films Bond, Angel With The Iron Fists a un certain charme rétro-kitch. Le film peut également être considéré comme un lointain ancêtre du genre Girls With Guns des années 80/90. Malheureusement, le manque de style et de vigueur dans la mise en scène et la nature somme toute assez surfait des personnages et du scénario font que le film ne s'élève pas beaucoup. Une appréciation du film dépend si l’on tombe sous le charme de Lily Ho; si oui les défauts d’Angel paraîtront un peu moins pesants, sinon ce pseudo Bond défaillant lassera très vite.

Pour Lily Ho, Angel With The Iron Fists marque ses grands débuts comme vedette glamour des Shaw. Ses prestations dans le mélodrame My Dream Boat et le musical Hong Kong Nocturne démontraient sa versatilité et auront consolidé sa position au sommet du star system des studios sur lequel elle resta perchée jusqu'à sa retraite en 1974. Lily Ho est apparue dans d’autres spy capers notamment une suite : Angel Strikes Again, de même que Brain Stealers, et Lady Professional. Vers la fin de sa carrière son rôle de courtisane vengeresse dans Intimate Confessions Of A Chinese Courtesan avait une étrange parenté avec celui de l’agent 009. Comme cette dernière, la courtisane devait séduire et duper ses adversaires pour mieux les détruire et parmi ces cibles l’on comptait une autre femme fatale vénéneuse. Comparer ce film de la maturité de l’actrice avec celui de ses débuts pourrait être un exercice intéressant pour quiconque s’intéresse au Studio Shaw Brothers et son évolution.
Yves Gendron 11/9/2010 - haut

Golden Buddha    (1966)
 Ayant échangé accidentellement sa mallette avec un ami croisé à l’aéroport, Paul Cheung (Paul Chang Chung) se retrouve prit pour cible par une redoutable organisation criminelle; "la Gang du Squelette". Pour assurer sa survie il devra échapper aux bandits, retrouvé la sœur de son ami défunt (première victime du gang) et résoudre le mystère du bouddha doré la statuette contenu dans la mallette qui est l’objet convoité par l’organisation.

 Dans la moitié des années 60, la «James Bond-mania» a conquis les cinémas du monde. De la France au Japon quantité de studios cherchaient à lancer leur propre variante d’un espion, séducteur et dur à cuire qui est la cible tant de vamp sexy que de redoutables organisations subversives. À Hong-Kong, les Shaw Brothers s’essaient pour la première fois à la production d’un «spy caper» (spy = espion; caper = film de genre avec un degré d’humour) en avril 1966 avec Golden Buddha. Le film est tourné par le réalisateur à succès Lo Wei, et a pour vedette la plus viril des stars de la Shaw : Paul Chang Chung. Le tournage a lieu en partie en Thaïlande.

En fait, plutôt qu’un film à la James Bond, Golden Buddha évoque surtout les films d’Alfred Hitchcock, le grand cinéaste des spy caper, et plus particulièrement son chef d’œuvre La Mort aux Trousses (film que de nombreux spécialistes considèrent d’ailleurs comme le premier James Bond tant les artifices de la série tiennent de ce seul film). Le héros n’est pas un agent secret mais un Don Juan (adepte en karaté tout de même) qui se retrouve lancé dans un chassé croisé entre lui, de redoutables gangsters et une belle fille cueillie au passage. Par contre, le film saute de plain pied dans un univers pseudo-bondien lorsqu'on arrive à l’antre des méchants : une base secrète d’allure futuriste et qu’on présente le petit rituel du « chef qui tuent les subordonnés ayant faillit ». Le chef lui-même est vêtu d’un accoutrement (uniforme doré, cape et lunettes noires) tenant plus de la bande dessinée que du cinéma. L’intrusion des éléments « bondiens » ne dure que lors des séquences dans la base. Les démarcations entre les deux tendances Hitchcock/ Bond s’avèrent aussi brusques que boiteuses mais ajoutent quand-même un zest kitch aussi absurde qu’amusant.

Les Shaw ont du étudier de très près les films de Bond et d'Hitchcock pour pouvoir reproduire leurs conventions et leurs artifices. Ils avaient aussi les moyens adéquats pour créer les décors futuristes de la base secrète et les uniformes bariolés des gangsters. Toutefois, les Shaw n’avaient aucune expertise dans le cinéma d’action moderne ni d’affinité véritable avec le spy-caper. Lo Wei lui-même n’avait presque jamais réalisé d’autre chose que des drames jusque là dans sa carrière. Golden Buddha s’avère donc un film d’action et de suspense au récit archi-conventionnel, raconté, tourné et monté sans brio avec une efficacité tout juste passable. Bref, la sauce ne prend pas. La trame musicale a du panache mais il s’agit la plupart du temps d’extraits empruntés aux vrais films James Bond. La vedette Paul Chang en Don Juan aux poings d’acier exhibe peut être un certain charme bien mâle mais il est loin d’égaler le charisme et la verve que l’on retrouve chez Gary Grant et Sean Connery ses plus proche modèles. Son personnage demeure superficiel, le film ne s’attardant jamais à révéler ses mobiles pour intervenir. On sait juste de lui qu’il pratique les arts martiaux et que c’est un élégant séducteur. Le dénouement est le point d’orgue des défaillances du film, lorsque suite à une ruse saugrenue, les gangsters se dégonflent subitement en énergumènes chamailleurs. .

Quant aux scènes d’action, partie cruciale des films Bond, Golden Buddha ne montre aucune cascade, juste 2 ou 3 fusillades sommaires de même que quelques poursuites dont l’une se déroule dans les ruines de l’ancienne capitale Thaïlandaise Ayutthaya et qui évoquent la séquence mémorable de la fuite au Mont Rushmore lors du dénouement de la Mort Aux Trousses (le site sera également entrevu dans plusieurs films kung-fu subséquents, notamment; Skyhawk, Tournament et Shaolin Hand Lock). L’action du film consiste surtout en des bagarres de style judo/ karatéka dans lesquels les acteurs et cascadeurs se démènent beaucoup mais dont la chorégraphie est parfois approximative (les coups frôlent souvent leurs cibles de loin) et qui sont assez platement filmés. Il y a quand même un passage à retenir lorsque Paul Chang affronte l’acteur Feng Yi une véritable ceinture noire de judo (il fera face plus-tard à Bruce Lee dans la scène du dojo de Fist Of Fury), la qualité de l’action est alors un peu plus relevée.

En fait, les Shaw à l’époque n’étaient non seulement pas habitués à faire des films d’action. Des films centrés sur un héros masculin était tout aussi nouveau pour eux. Ce sont les stars féminines qui dominaient le cinéma d’alors et les stars masculines étaient reléguées au second plan dans l’importance et le prestige des rôles. Il est d’ailleurs intéressant de noter que bien que Paul Chang soit le héros de Golden Buddha, son nom n’est placé qu’en 3eme place au générique d’ouverture derrière Jeanette Lin Tsui et Fanny Fan Lai les vedettes féminines qui pourtant n’apparaissent que tardivement et occupent moitié moins de temps à l’écran que Paul Chang.

La coquine et voluptueuse Fanny Fan (surnommée la Brigitte Bardot d’Asie) joue le rôle d’une vamp aguicheuse qui cherche à séduire le héros notamment en exhibant son derrière (ça aussi c’était nouveau à l’époque). Par contre Jeanette Lin qui apparaît à la suite est une ingénue très sage. Jusqu'à date dans sa carrière de star elle avait surtout joué les premiers rôles. Dans Golden Buddha elle se voit reléguer au rang assez accessoire de demoiselle en détresse. Toutefois, il y a un curieux petit retournement vers la fin du film puisque s’est son personnage qui résoud l’énigme du bouddha doré et grâce à une ruse désespérée parvient à déboussoler les criminels au dernier moment.

À l’époque de sa sortie Golden Buddha a du épater bien des chinois pour la nouveauté de voir un homme d’action suave et séducteur d’origine asiatique. Tout un changement avec le héros mâle traditionnel qui selon l’éthique ayant jusque là dominait le cinéma chinois depuis l’après guerre était défini plus par la souffrance qu’il endurait que par des actes d’héroïsme. Le succès dut être assez grand pour encourager les Shaw à produire toute une série de spy caper au cours des années à suivre, incluant Angel With The Iron Fists, (avec la starlette débutante Lily Ho toujours mis en scène par Lo Wei), Asia-Pol avec "Jimmy Bond Wang Yu" de même que Black Falcon, Operation Lipstick et Kiss and Kill dans lesquels Paul Chang reprenait du service. Mis à part Angel, tout ces films ont été mis en scène par des cinéastes japonais engagés par les Shaw qui eux avaient le savoir faire nécessaire pour mettre en œuvre des films d’action contemporains. Longtemps disparus de la circulation, la plupart des pseudo Bond Shaw ont refait surface au cours des années 2000 en format DVD/VCD ou sur le net.

En tant que film spy caper asiatique mi James Bond / mi Hitchcock Golden Buddha se qualifie comme une curiosité historique rétro-kitch C’est un bon exemple de cinéma « made in Shaw » avec ses ressources et ses limites. Les décors futuristes de la base secrète et quelques maladresses dans les tentatives de faire du pseudo bond font aussi un peu sourire ici et là. Ceci dit, tant les spy caper de Bond et de Hitchcock étaient des modèles de thrillers enlevés et spirituels, tant Golden Buddha ne s’avère n’être qu'un pastiche plutôt prosaïque et indigent.
Yves Gendron 11/9/2010 - haut

Dream Home    (2010)
 Une femme vraiment prête à tout pour avoir l'appartement de ses rêves.

 Quand on parle d’accouchement, on pense à des cris, de la douleur, de la joie, un tumulte d’émotions fortes en somme. On sait aussi que l'accouchement déroule en trois étapes. D’abord, les contractions de l'utérus, avec lubrification du canal cervical par le liquide amniotique, facilitant le passage de la tête du foetus. Ensuite, grosso modo tout se contracte pour faciliter l'expulsion du foetus par le vagin. Le bébé est en train de naître, mais le foetus est encore relié à la mère par le cordon ombilical. Finalement, vient l’ultime étape, la délivrance. Edmond Pang Ho Cheung n’est pas une femme, mais on peut dire qu’il a connu les souffrances d’un accouchement avant de connaître la délivrance en voyant son bébé découvrir le monde. S’imposant comme l’un des artistes les plus surprenants de l’ex colonie, c’est d’abord en tant qu’écrivain qu’il s’est fait connaître en écrivant ce qui servira de base au scénario du film FullTime Killer de Johnnie To. Il passera lui-même à la mise en scène dès 2001 avec You Shoot, I Shoot. Mais ses racines d’écrivain resteront indissociables de son travail derrière la caméra. Au-delà de l’originalité de ses films, on retiendra une identité stylistique très forte, et un sens aiguisé de l’écriture, ce qui lui permet de livrer des films bien écrits, sans que ses scénarios ne soient gratuitement compliqués. Mais de Men Suddenly In Black à Trivial Matters en passant par Beyond Our Ken, il est évident que Cheung sait raconter une histoire, tout en installant une ambiance, et surtout en permettant au spectateur de s’attacher à des protagonistes profondément humains, car loin du manichéisme qui hante nombre de productions récentes.

Le projet Dream Home fut annoncé comme le premier slasher made in HK, et l’auteur insistait dans sa promotion sur le gore très prononcé de son œuvre. C’était aussi l’occasion pour l’actrice Josie Ho, star du film, de créer l’événement autour de sa toute nouvelle société de production, 852 films. Prévu pour une sortie en 2009, ce n’est finalement que récemment que les spectateurs ont eu l’occasion de découvrir le film, suite à un différent entre la productrice et le réalisateur, concernant la violence dans le film. Mais au-delà de cette histoire mouvementée, et de l’argument graphique, c’est le contexte social fort qui surprend et interpelle. On n’avait pas vu de scénario avec un tel mordant et un message aussi puissant des années dans un film de Hong Kong. Dès le pré-générique, on comprend que la conjoncture n’est pas une simple introduction à l’histoire, mais qu’elle en constitue le cœur. Et l’auteur s’emploie à nous faire vivre la gravité de la situation, en présentant des chiffres dramatiques sur le salaire moyen de la population et les prix démesurés de l’immobilier.

On nous parle de folie, sur fond de musique angoissante, avant de nous confronter presque immédiatement à un premier meurtre d’une grande violence. Wong Ching, vétéran de la Shaw Brothers, y joue les figurants malchanceux. Cette introduction musclée pose les bases de la mise en scène : Pang n’a pas peur d’alterner montage dynamique et plans brefs avec des plans séquences qui rendent la sécheresse des scènes encore plus choquantes. On nous avait promis du sang, et on ne nous a pas menti. Non seulement les maquillages sont très convaincants, loin des délires rouges fluo auxquels on a parfois droit dans les slashers, mais en plus la réalisation insiste bien sur les blessures, infligeant au spectateur la douleur de les contempler longuement. Les impacts sont d’un réalisme saisissant, et on a mal pour les personnages, à qui aucune douleur ne sera épargnée. Malgré le grand nombre de morts violentes, la variété est au rendez-vous, et on n’a jamais la sensation d’assister aux mêmes exécutions. Il faut dire que Dream Home est loin de n’être qu’un enchaînement de scènes de massacre et bénéficie d’un rythme savamment étudié.

La narration est fragmentée, alternant le présent, signalé par l’affichage numérique de l’heure à chaque nouvelle scène, et des flashbacks, justifiés par l’apport de détails logiques pour mieux cerner les choix du personnage et l’humaniser. L’auteur va même plus loin en plaçant des flashbacks dans les flashbacks, mais la maîtrise de la narration reste totale, le récit reste donc constamment compréhensible. Ce parti-pris rend l’ensemble surprenant, et Dream Home n’est pas un film dont on devine le déroulement. Bien sûr, on a rapidement une idée globale de la situation, mais alors qu’on pensait avoir percé à jour les motivations réelles de chacun, un nouveau souvenir ou un nouveau coup de théâtre viennent remettre en question notre appréhension de l’histoire. Pourtant, on n’a jamais la sensation d’être floué par les scénaristes, qui ont mis un point d’honneur à créer une histoire simple, mais crédible. Tout n’est cependant pas parfait, car sur la fin, la tentation de céder au grand guignol facile n’est pas évitée. Alors que la nuance était privilégiée jusque-là, le dernier tiers du film s’enfonce inexorablement dans le scabreux pas franchement utile. On a un peu la sensation que Pang se soumet à des quotas, comme lorsqu’il filme des scènes de sexe grindhouse dans l’âme et ajoute une bonne dose de vomi. Les circonstances mêmes de cette situation sont bien plus grandiloquentes que ce à quoi on a assisté auparavant, et la résolution n’a plus rien de réaliste. Difficile, dans ces conditions, de continuer à prendre au sérieux un film qui a tout mis en œuvre, pendant une heure, pour nous faire croire à ces personnages pathétiques, pour nous investir dans leur histoire, et nous permettre de ressentir leur détresse. Pourtant, on est plus partagé que complètement déçu. En effet, le propos perd en force ce qu’il gagne en ultra-violence outragère et hilarante. Le carnage est tellement brutal qu’on attend impatiemment la prochaine victime. La crédibilité n’est définitivement plus de mise, mais les affrontements restent très intenses, grâce aux chorégraphies d’un Chin Kar Lok très inspiré. A l’image du reste du film, on se dit que tout peut arriver.

Cette dernière partie tranche donc radicalement avec l’atmosphère teintée de mélancolie des deux premiers tiers. Cette ambiance de jungle urbaine est illustrée de façon très efficace par les véritables remparts que constituent les façades de buildings, dans des ruelles aussi sombres qu’étouffantes. On est plus proches des villes prisons désespérées d’un Brothers From Walled City ou Long Arm Of The Law que de la peinture glamour de Hong Kong dont Johnnie To s’est fait l’illustrateur le plus romantique. L’effrayante tranquillité de la caméra du réalisateur confère un caractère inéluctable à cette sensation d’enfermement, qui rend la quête obstinée de l’héroïne aussi futile que pathétique. Son parcours du combattant, entaché de cadavres, est mis en parallèle avec une enfance rythmée par les jeux avec un voisin, la découverte du monde violent des adultes, et la confrontation avec l’humanité d’un père loin de l’image héroïque qu’a pu véhiculer Norman Chu par le passé. L’acteur, dont la calvitie naissante sur le haut du crâne et des traits vieillissants créent une ressemblance saisissante avec Ti Lung, est d’une justesse incroyable. Il n’apparaît que peu, mais irradie la pellicule par sa présence. Tour à tour effrayant, touchant, et presque pitoyable, il incarne un père profondément humain, dépassé par une société où règnent l’individualisme et le profit, et qui ne sait plus comment sauver les siens. La mélancolie dans laquelle baigne l’histoire de cette famille ordinaire rend l’intrigue bien plus profonde et intéressante que les scénarios les plus complexes du monde. Tout est simple, mais surtout, tout est vrai, tout est juste. Le message politique est puissant, car il s’instille par petites touches dans le récit, et tout en étant l’un de ses éléments fondateurs, il ne prend jamais le pas sur les personnages.

L’interprétation n’est par contre par extraordinaire globalement. Seule Josie Ho bénéficie d’un temps de présence à l’écran significatif, et si elle joue son rôle avec conviction, elle ne témoigne pas de talents d’actrice époustouflants et ne crève jamais l’écran. Norman Chu est donc le seul acteur a réellement marqué le film de sa présence, et le faible nombre de ses scènes ne rend son destin que plus poignant. Les ruptures de ton nombreuses peuvent être déstabilisantes, mais Pang parvient à conserver une unité, si on lui pardonne l’écart du dernier tiers, qui vire au slasher facile mais jouissif. De ce point de vue, le film tient ses promesses, et c’est bien en tant que film social qu’il risque de décevoir. Le twist final, très bien amené, permet au réalisateur de nous rappeler que malgré un débordement un peu gratuit, il n’oublie jamais son histoire, ni ses personnages, et que c’est bien la qualité de l’écriture, et l’identité visuelle très forte qui font de Dream Home l’un des films les plus marquants de cette année 2010, redonnant réellement espoir au milieu d’un flot de productions paresseuses à l’écriture décevante et aux histoires peu prenantes.

Merci Edmond Pang Ho Cheung pour cette nouvelle œuvre personnelle, ambitieuse, non dénuée de défauts mais sincère et très prenante.
Léonard Aigoin 11/8/2010 - haut

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