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Les Arts martiaux de Shaolin (1986) |
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Milieu des années 80, Lau Kar Leung est en perte de vitesse sur le marché hongkongais, ses derniers films sont des échecs publics et critiques. Il semble perdre pied dans une industrie cinématographique en plein bouleversement et laisse la part belle à une nouvelle génération qui ne jure que par la Kung Fu Comedy. Il s’est lui-même essayé au genre (The Lady Is The Boss, Disciples of the 36th Chamber), mais n’est pas convaincu du résultat et, surtout, n’a pas convaincu. Une opportunité se présente alors à lui : il a été choisi pour mettre en scène la première co-production sino-hongkongaise de film d’arts martiaux. Désenchanté par la situation qu’il est en train de vivre, il saute sur l’occasion et exprime alors l’ambition de tourner une œuvre martiale qui plongerait dans les racines mêmes de Shaolin, sur les véritables lieux plein d’histoire et de spiritualité. La Shaw Brothers est tout d’abord pressentie comme le partenaire hongkongais de la société de production chinoise Pearl River Film. Elle se lance dans l’aventure mais, bien vite, Run Run Shaw décide d’abandonner la production cinématographique et de se tourner vers la télévision. Martial Arts Of Shaolin, bien que bénéficiant d’une partie de l’équipe technique hongkongaise, sera finalement un film chinois. En ce milieu des années 80, Lau Kar Leung se voit donc à la tête d’un confortable budget, d’une troupe d’acteurs éblouissants et de magnifiques décors dans lesquels aucun autre réalisateur hongkongais n’a encore jamais tourné.
Un jeune et turbulent disciple de Shaolin (Jet Li) est élevé au sein d’un monastère du nord de la Chine après que ses parents aient été assassinés par un cruel général (Yue Sing Wai). Il apprend un jour qu’une grande fête est donnée pour l’anniversaire de ce puissant militaire qu’il s’est juré d’occire. Il parvient alors à s’échapper de l’enceinte du temple et se mêle aux artistes qui donnent un spectacle à cette occasion. La tentative de vengeance échoue finalement mais lui fait rencontrer d’autres opposants venant du sud (Woo Gin Keung et Huang Qiu Yan) qui partagent le même objectif. Ils tenteront d’allier les techniques martiales du nord et du sud pour mener à bien leur projet.
Martial Arts Of Shaolin s’inscrit dans la « trilogie Shaolin » qui a lancé Jet Li au firmament des acteurs martiaux après Shaolin Temple (1982) et Kids From Shaolin (1984). Pouvait-il exister de meilleur réalisateur que Lau Kar Leung pour conclure cette saga épique ? Y avait-il, à cette époque, de plus fougueux artiste martial que Jet Li, cinq fois champion de Chine de Wushu en six ans ? Lau Kar Leung transmet un peu de sa philosophie (notamment au travers de la chanson des génériques de début et de fin, véritable traduction musicale de sa pensée martiale, mais aussi de l’alliance des techniques Shaolin du nord et du sud) et fait bénéficier Martial Arts Of Shaolin de sa mise en scène dynamique et de son sens des combats (chorégraphies et découpage cinématographique, grosses faiblesses des deux premiers opus platement filmés). Jet Li, quant à lui, apporte sa vitalité débordante et son charme naturel, atouts qu’il perdra d’ailleurs par la suite dans d’exécrables productions occidentales. L’influence des grands classiques de la Shaw Brothers est indéniable dans le soin porté aux costumes, aux décors et au nombre impressionnant de figurants. On est loin des productions bon marché avec trois clampins habillés de haillons qui s’ébattent dans la nature, histoire de ne pas trop investir dans les arrières plans ! Les décors mis à la disposition du réalisateur sont grandioses : de la Citée Interdite, où une gigantesque fête est donnée, aux temples bouddhistes, en passant par de magnifiques sites naturels, tout droits sortis de peintures classiques, et un superbe bateau à deux ponts. Une raison de plus pour que Lau Kar Leung, descendant des maîtres de Shaolin et réalisateur prodige de la Shaw Brothers, accepte cette commande chinoise et s’avère être l’homme de la situation !
Martial Arts Of Shaolin est peuplé d’acteurs pour la plupart inconnus à Hong Kong, habitués des productions continentales. Le terme d’acteur est d’ailleurs peut-être un peu excessif : ce sont avant tout de superbes athlètes martiaux mis au service d’un film. (D’où la relative faiblesse de leur jeu…) Parmi eux on remarque cependant quelques figures connues tels Yue Hoi, Kai Chun Wah, Mak Wai Cheung et Hung Yan Yan, ainsi que l’ex-Madame Jet Li, Wong Chau Yin (qui eut une carrière éclair et ne tourna que dans deux films…).
Le ton général de Martial Arts Of Shaolin est léger, même si les combats sont légion, mais la conclusion laisse cependant un goût amer au spectateur. La scène a lieu à l’issue d’une joute féroce, au moment où la tête d’un épéiste se fait trancher (seul événement réellement sauvage du film) : les jeunes protagonistes, hébétés, s’essuient le sang qui a giclé sur leur visage. C’est une vision cruelle du passage de l’innocence à l’âge adulte, une prise de conscience de la barbarie du monde, qui conduira le héros au renoncement… et au monastère. Le message de non violence cher à Lau Kar Leung est une nouvelle fois mis en avant.
Les combats sont réalistes, sans ressembler à de simples démonstrations de Wushu, critique que l’on pouvait porter aux deux premiers épisodes de la trilogie. Les scènes d’action s’enchaînent en nous exposant chaque fois de nouvelles techniques martiales, poings nus ou armés de lances ou d’épées. Le film se clôt d’ailleurs par une très belle chorégraphie utilisant le style de la Mante Religieuse (« Shaolin Mantis »).
Malgré toutes ses qualités, on pourra légitimement reprocher à Martial Arts Of Shaolin son manque de profondeur et avoir le sentiment d’être passé à côté d’un réel chef-d’œuvre. C’est vrai. Mais le spectateur peut facilement percevoir qu’il est devant un film unique avec une star en devenir encore fraîche et innocente, un joyau brut… Jet Li !
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David-Olivier Vidouze 1/5/2005 - haut |
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