The Wandering Earth est la première superproduction de science-fiction spatiale chinoise. C’est un tournant majeur du cinéma chinois. Jusqu’à alors, les superproductions chinoises à effets spéciaux s’inspiraient surtout de la mythologie fantastique chinoise telle le Roi Singe. Toutefois avec Wandering Earth, le public de Chine a droit pour la première fois à une odyssée cosmique et des héros taïkonautes de leurs pays. C’est tout aussi énorme que The Black Panther pour les Afro-Américains. Ne faisant pas les choses à moitié, Wandering Earth a été également conçu pour être en format Imax et 3D. C’est vraiment une production épique qu’il a fallu quatre ans à produire.
En termes de scénario et de spectacle The Wandering Earth est l’équivalent du film hollywoodien Armageddon avec Bruce Willis sorti en 1998. Le récit est basé sur une nouvelle de l’écrivain sci-fi Liu Cixin qui est le premier chinois à rapporter un prix Hugo pour un roman en 2015.
L’acteur martial Jacky Wu Jing joue un "taïkonaute" (un astronaute en Chine) et a également investi financièrement dans la production du film. Le vieux comparse de Stephen Chow, Ng Man Tat, joue le beau-père du personnage du Wu et son rôle est si distinct de ses prestations comiques que je ne l’ai pas reconnu. Les autres personnages principaux sont le fils et la fille adoptive du taïkonaute ce qui donne par moment à la fresque le caractère plus intimiste d’un drame familial. Le reste de la vaste distribution est constitué d’acteurs pas ou peu connus en occident.
Au-delà de sa stupéfiante prémisse d’une terre baladeuse, The Wandering Earth n’offre rien de bien nouveau par rapport aux superproductions hollywoodiens. De façon générale, c’est une grosse machine à la mécanique bien huilée qui carbure aux clichés et aux emprunts (Armageddon bien sûr, mais également The Day After, et 2001 A Space Odyssey). Tant les personnages que les situations dramatiques sont des plus convenues avec une bonne dose de mélo et de bons sentiments mielleux reposant sur les liens sacro-saints de la famille et l’esprit de sacrifice.
Cela dit, le récit est efficace, les personnages sympathiques et l’univers présenté crédible grâce à des décors détaillés et l’emploi d’effets spéciaux léchés. Si certains effets CGI ne sont pas tout à fait convaincants, d’autres par contre en mettent plein la vue. Les vues rapprochées de Jupiter, de la station spatiale Hélios et de Shanghai pris dans les glaces par exemple sont des plus saisissantes.
Un autre aspect qui est impressionnant est le budget. Au moins six compagnies d’effets spéciaux numériques ont œuvré sur le film de même que la Weta Workshop pour réaliser des scaphandres, des exosquelettes et d’autres accessoires. Malgré tout, au final Wandering Earth n’a couté que 50 millions, une somme certes énorme pour une production asiatique, mais deux à quatre fois moins chère qu’une production de même envergure à Hollywood. Interstellar par exemple a couté 165 millions, Gravityjusqu’à 130).
Wandering Earth a été conçu pour plaire à un public chinois et les remplir de fierté. À ce niveau on peut considérer comme une réussite totale et il constitue un début encourageant pour la science-fiction spatiale chinoise. À quand un Alien, un Star Wars ou un Star-Trek chinois? Pour un public occidental plus blasé en spectacle de ce genre l’attrait est moindre, mais malgré la nature stéréotypée et dérivative tant des personnages que du script, le spectacle en vaut la peine. Il y a aussi quelque chose de rafraichissant à voir une odyssée spatiale qui n’est pas dominée par des héros masculins blancs et des valeurs héroïques occidentales. Bien que chinois centrique le film n’est pas chauvin outre mesure et des échanges en anglais, français et russe se font entendre. Un autre bon point pour le film.